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Mots et images de Joe Krapov
12 octobre 2013

L'ORIGINE DU MONDE

 

LOrigine-du-Monde-Courbet

L’origine du monde ! Gustave Courbet ! Qu’aurait-il pensé et dit, le peintre, en apprenant que le psych-anal-liste Jacques Lacan posséda un certain temps ce tableau mais qu'il le tenait bien caché à l'abri des regards ?

Dans nos imaginaires – je ne sais pas pour vous, mais moi de plus en plus ! – on a tendance à voir dans les psy-canal-ystes et chez les autres médecins des âmes des espèces de confesseurs très détachés des choses du sexe. Ces hommes de l’art ne seraient pas des cochons, mesdames ! Ils ne seraient pas obsédés pour deux ronds sauf par le nombre des euros que le client leur laisse à la fin de la séance.

Et pourtant, si j’en crois Etienne Klein, une anagramme possible de « l’origine du monde » est « religion du démon ». J’en déduis que le psychanalyste n’aime pas tirer le diable par la queue. Il craint sans doute que celle-ci lui reste dans la main. Et vous l’imaginez, Lacan, avec l’appendice caudal à la main dans le petit cabinet où s’allongent les patients ?

Les patients… Savez-vous qu’on les nomme ainsi parce que la guérison arrive très tard, ce qui permet de rapporter plus gros au soignant ? Celui-ci, devenu riche, peut alors chiner les Courbet aux puces à saint-Ouen tandis que nous continuons de courber l’échine sans faire de tintouin pour gagner plus modestement notre croûte.

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Et donc une fois en possession de ce trésor, notre Jacques s’empressa de le cacher. Longtemps je crus que c’était derrière un rideau noir mais madame Wikipe m’a appris que l’œuvre était dissimulée derrière un tableau surréaliste plus présentable d’André Masson, beau-frère du praticien. Acheter cher un tableau pour le tenir caché à l’abri du monde, c’est honteux !

Dans le même ordre d’idées, pour confirmer mes dires sur l’asexualité des disciples de Siegmund, Freud aurait déclaré : « Quelquefois un cigare est juste un cigare ».

Du reste, pour un peu, à cause de Fabrice Luchini, j’aurais confondu Jacques Lacan avec Roland Barthes et j’étais à deux doigts de penser que cela correspondait à des cachotteries d’homosexuels. Notez que je n'ai pas écrit cachochotteries. Je ne suis ni homophobe ni homophile, bien au contraire !

Peu importe. Je continue et je crois que je continuerai encore longtemps à me demander ce que faisait chez Lacan « L’origine du monde », ce vagin où goutte l’ombre du désir.

 Ecrit pour l'atelier d'écriture de Villejean le 10 septembre 2013 d'après la consigne : écrire le texte entre l'incipit "L'origine du monde, Gustave Courbet" et "ce vagin où goutte l'ombre du désir" qui en est l'anagramme tirée de ce livre.

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11 octobre 2013

JEAN-FRANCOIS CHAMPOLLION, CONSERVATEUR DU DEPARTEMENT D'EGYPTOLOGIE DU MUSEE DU LOUVRE

Jean-François Champollion, conservateur du département d’égyptologie du Musée du Louvre n’a pas toujours été cet homme respectable que l’on imagine et il n’a pas appartenu de tous temps à cette caste d’hommes célèbres dont l’histoire a conservé le nom au prétexte qu’ils étaient versés dans la science plutôt que dans le bas-côté boueux qui bordait en son temps la route de la gloire.

Et d’ailleurs ceux qui tombaient dans le fossé n’avaient plus qu’une chose à espérer : que le père de Victor Hugo eût à passer par là et dît à son hussard qu’il aimait entre tous : « Donne-lui tout de même à boire ! ».

Dès sa prime jeunesse Jean-François démontra qu’il était un homme de caractère et ses parents très vite eurent du mal à le comprendre. Lorsqu’il fut plus grand il eut maille à partir avec des moutardiers de Dijon. Car la famille Champollion avait ses racines dans l’Est. Certains étymologistes prétendent que Champollion viendrait de Champagne-Olion et que le « agne » disparut dès les premières contractions. Comme ses ancêtres tâtaient de la dive bouteille, ils eurent vite fait d’avoir en permanence soit un coup dans le nez, soit un coup dans l’aile, ce qui fit qu’à la longue Olion en prit deux avant que le tiret ne soit limogé et que le champ qui en avait pris ne revienne se coller dans la cage Ollion. Tout cela explique, encore aujourd’hui, que les Olion de Limoges ont de la parenté à Reims mais mon penchant pour la boisson m’a fait m’éloigner un peu trop de Jean-François et de sa mère.

Car vous savez comme sont les mères ! Oui, c’est ça, fusionnelles, et parfois même complètement chiantes, sauf la mienne et la vôtre évidemment ! Pendant sa jeunesse étudiante, une période au cours de laquelle il fit les quatre cents coups et même plus vu qu’il avait des affinités, il recevait chaque semaine une lettre de sa maman. La missive était pleine de recommandations, de conseils, de rappels et d’interrogations du type : « Que deviens-tu mon fils depuis la semaine dernière ? Bois-tu avec modération ? Te comportes-tu avec sagesse ? Agis-tu avec prudence ?». Les mères nous poussent à sortir avec des filles aux prénoms plus qu’improbables alors qu’il est si simple de boire avec La Goulue et d’en venir très vite aux mains avec Félicité qui n’attend que ça pour être heureuse.

Mais comme on avait encore à cette époque-là un peu de respect pour les croulants et les vieux birbes, plus qu’aujourd’hui en tout cas, il répondait sans rien lui dissimuler de sa vie dissolue.
- Aujourd’hui, chère Maman, je suis pianiste dans un bordel. ».
- Cette semaine, je travaille dans la réclame ». On ne disait pas « pub » à l’époque bien qu’on en fréquentât beaucoup, surtout en Angleterre, pour boire de la bière qu’on appelait Ale, d’où l’expression « avoir un coup dans l’ale ».
- Aujourd’hui, chère maman, j’ai raté mon CAPES pour la troisième fois consécutive ». « Ma send me money now, i gonna make it somehow » disait un tube de l’époque.
- Aujourd’hui chère maman, je tourne dans un porno avec George Sand et Alfred de Musset. On est à l’hôtel Danieli à Venise. ».
- Ma chère maman je vous écris que nous sommes entrés dans le pari de faire durer encore huit jours cette bataille d’Hernani dont tu as sans doute entendu parler. A propos… je préviens tout de suite, c’est une plaisanterie d’outre Rhin… Connais-tu le nom de l’épouse d’Herr Nani ? C’est très facile, c’est Frau Majkipu ! ».
- Cette fin de semaine, Pierre a épousé Rosette. ».

La pauvre femme ne trouva la tranquillité d’esprit que le jour où elle reçut une lettre d’Egypte qui disait :
« A la lueur fauve d’un gros lampion dépoli, et gouvernant mon émoi, je décrypte des cartouches. ».

Ecrit pour l'atelier d'écriture de Villejean le 10 septembre 2013 d'après la consigne : écrire le texte entre l'incipit "Jean-François Champollion, conservateur du département d’égyptologie du Musée du Louvre" et "A la lueur fauve d’un gros lampion dépoli, et gouvernant mon émoi, je décrypte des cartouches" qui en est l'anagramme tirée de ce livre.

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15 septembre 2013

LA SAINTE VIERGE

La Sainte Vierge, la maman de Jésus, la pauvre Marie en aurait entendu des vertes et des pas mûres si elle avait vécu plus longtemps. Déjà qu’elle a dû en voir de toutes les couleurs si tout ce qu’on dit sur elle est vrai !

Ce n’est pas moi en tout cas qui jetterai la pierre à la femme adultère, j’aime trop Georges Brassens pour ça et je sais bien qu’il est derrière mais je connais les noms de ceux qui ont commencé pour que je continue. Le plus moqueur est Jacques Prévert dont tout le monde connaît « Je vous salis ma rue » : ah le gros cochon de contrepéteur ! C’est aussi à lui qu’on doit « l’émasculée conception ou qui aime bien châtre bien ». Un drôle de numéro, ce mec-là !

Je ne sais plus ce que j’ai fait pour ma part avec l’immatriculée contraception ni où je l’ai mis et je ne veux plus vraiment le savoir car depuis les lectures de mon adolescence j’ai grandi quelque peu et je ne me réjouis plus de « la passion considérée comme une course de côte » par Alfred Jarry.
Je me retrouve bien plus dans le récit qu’a fait de cet épisode tragique le poète champenois et montmartrois Bernard Dimey. Un temps j’avais tenté d’apprendre ce texte par cœur :

« Tu viens, c’t’après midi à la crucifixion ?
T’as qu’à v’nir avec moi, ça t’changera les idées !
Ta bergère est pas là, profite de l’occasion !
Moi j’ai prévenu Lévy que j’prenais ma journée. »

Et même, en vieillissant, il m’arrive souvent d’entrer dans les églises malgré mon athéisme bien irrécupérable. Je n'emploie pas les mots de Saint-Sulpicerie pour désigner la déco kitsch et tristounette qui encombre parfois certains de ces édifices… « du père et du Saint-Esprit ! » me souffle Jacques Prévert ou son fantôme têtu qui commence quelque peu à faire suaire à la longue.

Mieux, je trouve parfois dans les lueurs des vitraux, dans la projection de leurs couleurs sur les murs ou dans les allées matière à admirer, en tant que photographe, un grand Dieu de lumière et une humanité emplie de bâtisseurs qui n’avaient pas prévu que l’ami Charles Cros et ses contemporains s’acharneraient un jour à l’invention du Kodachrome !

Mais, toujours, à marcher sous l’ogive de certaine cathédrales, dans le sein des églises et des humbles chapelles, quel que soit le style de l’artiste, quelle que soit la matière utilisée pour sculpter la Madone, malgré les sobriquets dont l’affublent Prévert et d’autres hérétiques erratiques ou en toc, je lui trouve, à la Sainte-Vierge un visage inaltéré.

 

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Photo prise en l'église de Trémolat (Dordogne) le 28 juillet 2013

 Ecrit pour l'atelier d'écriture de Villejean le 10 septembre 2013 d'après la consigne : écrire le texte entre l'incipit "La sainte Vierge" et les deux mots de la fin "visage inaltéré" qui en sont l'anagramme.

21 juillet 2013

LE TOUAREG (1)

Il y eut un temps, il y a très longtemps, où la ville de Rennes s'appelait Condate. A cette époque lointaine, ni la tour des Horizons, ni le marché des Lices, ni le métro n'existaient encore. C'est vous dire à quel point c'était il y a longtemps.

En ces temps quasi-immémoriaux le marché des Lices avait lieu place de la Mairie. Il n'était pas rare à l'époque de trouver parmi les vendeurs de galettes-saucisses des marchands venus de plus loin que Betton, que Bécherel ou même que Landerneau. Mais quand Omar le touareg a monté son estrade juste devant la niche où trônait encore une statue de Vercingétorix à genoux devant César, on peut dire qu'il a installé un fameux souk dans le paysage. A vrai dire, c'était la première fois qu'on voyait un touareg à Condate.

touareg

Il portait bien sûr un grand turban bleu et une espèce de chasuble aux manches dorées. Il avait de longues mains, curieusement assez blanches et osseuses, dont il jouait abondamment, comme tous les latins et les plus que latins, quand il donnait des ordres à ses aides chameliers en train de déballer des monceaux de marchandises. Tout le monde autour d'eux ouvrait de grands yeux ahuris. Que l'étranger fît halte à Condate, passe encore. Mais surtout qu'il y vînt pour faire du commerce et que l'on ignorât ce qu'il avait à vendre, voilà qui piquait au plus vif la curiosité des autres forains et celle des chalands qui passaient au pied du beffroi.

 

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21 juillet 2013

LE TOUAREG (2)

Quand neuf heures sonnèrent au clocher de la grosse Françoise, deux des aides-chameliers frappèrent sur des tambours et Omar monta sur son estrade. Dans un gallo tout ce qu'il y a de plus correct, avec juste l'accent un peu plus pointu de ceux qui ont grandi dans le quartier Sud gare, il déclara :

- Pas de salamalecs, les mecs ! Pas de salades aux loukoums, les Oum Khalsoums ! Approchez, approchez, Condataises et Condatais. Je m'appelle Omar Mer et je viens de très loin. Nous sommes commerçants de père en fils et ce depuis trente-six générations. Dans notre famille, on a toujours eu la bosse du commerce et avec nos dromadaires et nos chameaux, nous avons parcouru le monde entier pour vous ramener, amies Condatiennnes et amis Condatiens, des plus lointains pays, les plus inattendues, les plus folles, les plus délirantes des marchandises dont vous n'aviez pas forcément besoin mais que vous allez acheter quand même ! Tout pour votre bonheur, messeigneurs. Commençons, si vous le voulez bien par les célibataires. Y a-t-il des célibataires dans l'assistance ?

Quelques index intimidés mais curieux s'élevèrent de ci delà au-dessus des têtes

- Approche, mon ami. Je vois à tes yeux hébétés et à ta langue pendante que tu en as ras la casquette de chercher l'âme sœur sur Internet et de ne tomber que sur des annonces matrimoniales proposées par la maffia russe. Omar Mer t'a apporté la solution à tous tes problèmes. Regarde. 108 écus sonnants et trébuchants pour ce pot de femme-fleur d'oranger. Tu arroses tous les jours pendant quinze jours et regarde ce qui pousse. Regardez, amis Condatifs, amies Condatives. Vous n'allez pas en croire vos yeux.

femme-fleur

Les deux assistants écartèrent la tenture aux motifs orientaux et revinrent portant un gigantesque pot de fleur dans lequel était plantée une grosse tige noire. Des "oh" et des "ah" admiratifs s'échappèrent du public. En haut de la tige, une superbe jeune femme vêtue d'une robe orange, avec des cheveux orange, des fleurs jaunes dans les cheveux, des yeux magnifiques, une bouche groseille se mit à se balancer sur la tige au son d'une musique venue d'ailleurs, envoûtante, sirupeuse, abracadabrahatloukoumesque.
- J'achète ! lança le Toine, 43 ans aux fraises et toujours pas marié aux radis.
- Attends, mon brave ! Pas de précipitation. Chez Omar Mer tu as le choix entre plusieurs options. Peut-être préfères-tu la femme rose ou la femme violette ? Ou encore la femme coquelicot ? Assistants ! Montrez l'assortiment !

D'autres femmes fleurs furent amenées sur le devant de l'estrade. Tout le lot de pots de graines de femmes-fleurs partit en un instant.

femme-fleur 2

 

 

 

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21 juillet 2013

LE TOUAREG (3)

- Maintenant, pour vous mesdames, nous avons la même chose et en couleurs ! Voulez-vous d'un homme objet ? Décoratif, docile, ne coûtant pas cher à nourrir et surtout attaché à son foyer, joli à regarder autant qu'agréable au toucher. Messieurs les assistants, montrez l'objet à ces dames.

homme-objet 2

Ils étaient si élégants, si distingués, si craquants, ces personnages à la Magritte sur fond de beffroi breton que ce fut une véritable ruée et que bientôt, dans toutes les rues de Condate on ne croisa plus que gens réjouis emmenant chez eux leur pot rempli de terre et leur espoir d'en voir sortir, d'ici une quinzaine de jours, une fleur humaine magnifique.

homme-objet

Quand Omar eut vendu tout son stock, il regarda la place et n'aperçut plus qu'une toute jeune fille vêtue d'une robe rose et coiffée de deux couettes fleuries fort originales. Elle le regardait fixement et semblait attendre quelque chose d'autre de lui.

- Eh bien la belle ? Tu n'as pas trouvé chaussure à ton pied ? Le show est terminé, tous mes pots sont partis comme des petits pains.
- Ce ne sont pas vos petits pots qui m'intéressent, monsieur Mer, c'est votre chameau.
- Lequel ? C'est que j'en ai toute une caravane !
- Celui-là !" dit la jeune fille en montrant du doigt un chameau particulièrement famélique.
- Ce chameau-là ? Mais cet animal est très vieux et de plus il a une malformation congénitale.
- Oui, oui, j'ai remarqué. Combien me le vendez-vous ?
- Ecoutez, vous n'allez pas faire une affaire. Je ne lui donne pas un an à vivre. Et puis le climat breton, pour les chameaux, c'est trop humide.
- J'insiste !
- Ma foi, puisque vous insistez, je vous le laisse à cent écus.
- Marché conclu. Dites-moi simplement comment il s'appelle.
- Il se nomme Khalifa.

***

Quand Isaure Chassériau, la jeune fille vêtue de rose, ramena chez ses parents le chameau à trois bosses, elle n'entendit d'abord que des hauts cris. Et puis, comme on vivait déjà alors en intelligence par ici, les cris se transformèrent bientôt en rires. Et enfin, quand Isaure fit fortune en louant l'animal pour des promenades à deux dans les rues de Condate, les cris et les rires se muèrent en admiration et en fierté dans la famille Chassériau et dans son entourage.

***

21 juillet 2013

LE TOUAREG (4)

Au moment de conclure cette histoire, il me faut répondre à deux questions que le lecteur attentif et à la curiosité aiguisée n'aura pas manqué de se poser.

- Des femmes-fleurs et des hommes-objets sont-ils sortis des pots vendus par Omar Mer aux habitants de Condate ? La réponse est : "Bien sûr que non".

- A-t-on la preuve de l'existence de Khalifa, le chameau à trois bosses ? La réponse est "oui". Son portrait figure encore sur la façade du restaurant homonyme qui trône en haut de la place des Lices, à Rennes.

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Et surtout, le chameau à trois bosses est enterré au cimetière de Brelevenez à Lannion (Côtes d'Armor). Pour vous rendre sur sa tombe, le mieux est d'emprunter les escaliers très jolis qui mènent à cette église qui surplombe Lannion.

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Si jamais par malheur vous ne trouviez pas la tombe de Khalifa dans le cimetière, surtout ne m'en veuillez pas. Profitez du panorama. Lannion, ce n'est pas aussi bien que Rennes mais c'est quand même pas mal non plus.

N.B. Cette histoire écrite en 2002 était restée inédite jusqu'à ce jour.

5 mai 2013

VERSION MODERNE D’UNE HISTOIRE ANCIENNE

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Dans une forêt de jambes, de pieds, de bottes odorantes, le petit Poucet se frayait difficilement un chemin. Cela faisait longtemps maintenant qu’il n’avait plus senti la main de sa maman dans la sienne, il avait perdu ses frères en chemin et pour ne pas se faire écraser, il s’était accroché à un bas de pantalon.

Puis il avait lâché prise, s’était réfugié sous une feuille de salade, avait écouté les annonces de produits en promotion, avait regardé les ogres qui passaient et repassaient dans ce lieu éclairé au néon en poussant leurs tombereaux chargés de petits enfants coupés en morceaux, de fruits, de légumes. Le petit Poucet était un être courageux, opiniâtre. Il ne fallait pas qu’il pense qu’il s’égarait d’avantage, qu’il tournait en rond et ne retrouverait jamais son chemin.

Cependant, comme il n’en pouvait plus de fatigue, il se hissa sur le sommet d’une sandale. Il avait eu le temps de voir, en levant le nez, qu’il se trouvait à la verticale d’un monstre de sexe féminin.

Il n’y avait pas, il fallait qu’il se manifestât. En même temps que sa maîtrise du subjonctif, il sortit de sa poche un cure-dents et, comme le gros orteil de la dame était en charpie – elle avait dû l’éclater en shootant dans un piano un jour de colère ou d’inattention - , il planta son épine dans le petit orteil de sa transporteuse.

Au début, cela ne lui fit rien à l’Adrienne, puis, à la troisième piqûre, irritée, elle se pencha et vit le minuscule petit lutin qui lui demandait de sa toute petite voix :

- S’il vous plaît, madame ? Est-ce qu’on est encore loin de la sortie du Supermarché Géant ?

Ecrit à l'atelier d'écriture de Villejean le 2 avril 2013. Il s'agissait d'un texte tournant. Les deux premiers paragraphes ont été composés par Dominique et Eliane.

 

5 mai 2013

LA FOURMI ELECTRIQUE

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Je suis la fourmi électrique,
La productrice infatigable.

Je bosse chez Philip K. Dick :
Je répare quand il pète un câble.

Lorsque Vulcain devient marteau,
En attendant l’année dernière,
Je vais mettre en haut du château
Les boules de la loterie solaire.

Toute réalité m’esquinte.
J’arrive au bout du labyrinthe
Et j’y découvre, délétère,
La vérité avant-dernière :
Je suis la fourmi électrique
Et le monde a pété un câble.

Mais, sous votre peau de plastique
Etes-vous certain d’être aimable ?

5 mai 2013

S'EVAPORER

Si, à Pise, la tour partait dans la nature,
Eprouverais-je alors un penchant pour Florence ?
Le vieux pont sur l’Arno serait-il aventure
Ou serait-il atteint aussi de transparence ?

Venise sans soupirs au pont de l’ascension,
Paris sans tour Eiffel, Rome sans Colisée…
Que pourrait signifier cette disparition
Des monuments du monde entier les plus prisés ?

Et pourtant, chaque jour où l’on marche dans Rennes
Voit disparaître autant de pépites célèbres :
Baigneuses colorées pêchées comme sirènes
Et la Maison du peuple enfuie dans les ténèbres.

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Rue Saint-Louis, combien de temps survivra-t-il,
A l’Artiste assoiffé de choses surprenantes,
Le terrifiant et surprenant ptérodactyle
Qui joue le rôle ici de l’éléphant de Nantes ?

De la ville éphémère humble et doux serviteur
J’archive le travail du Temps. Ce que j’observe
Devient trésor au fond de mon ordinateur
Au fur et à mesure qu’Il flanqu’ tout aux réserves !

Ecrit à l'atelier d'écriture de Villejean le 26 mars 2013

 

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