C’est un endroit très chouette, un très grand jardin dans lequel les gens se promènent sans manières mais pas sans distinction.
C’est le parc du Thabor, un endroit empli de verdure en plein centre de la ville de Rennes. Si vous n’êtes que de passage dans cette cité, un samedi ou un autre jour, allez-y obligatoirement. Votre cœur de touriste se chargera peut-être d’émotion devant les statues de Charles Lenoir.
Pour ma part j’éprouve toujours un peu de chagrin devant celle qui représente cet imbécile d’Hermès, Dieu du commerce et des voleurs et pour l’heure sous-préfet d’Hadès, le maire du palais des Enfers, en train d’enlever la fille Eurydice au poète Orphée au prétexte que le musicien a tourné les yeux sur son épouse avant même que d’être sorti de la nuit souterraine.
Les Dieux romains et grecs ! Gavés d’ambroisie au buffet de Ganymède, soûlés de nectar dans les bars de l’Olympe, pourront-ils jamais comprendre quelque chose à l’amour des hommes ?
Que pouvons-nous attendre de ces brutes en blouson clouté qui n’ont jamais cueilli un bouquet de primevères, qui se changent en oiseaux, taureau ou cygne – pourquoi pas en canards du bois joli ou en grenouilles à embrasser ? – pour séduire nos belles et les tromper derechef ?
Il y a plus de douceur dans l’autre groupe sculpté à l’autre bout des jardins à la française. Il représente Diane, déesse de la Lune, arrêtée dans ce lieu au hasard de sa promenade nocturne avec ses compagnons, son arc, son carquois et ses chiens aux pattes cassées.
Derrière la roseraie en contrebas vous apercevez un bout de Toscane grâce au profil typique du collège Saint-Vincent et avec un peu d’imagination on croirait entendre ici une chanson italienne de la Renaissance accompagnée au luth. Non, vous n’êtes pas clients ?
Tant pis ! Les roses n’étaient pas sorties mais les tulipes, si. Sous le kiosque à musique je me souviens de robes de bal virevoltantes – la valse, ça ne mange pas de pain ! – et d’orchestres de vents pas mauvais, n’en déplaise à Paul Verlaine.
Dans ce trou de verdure où ne coule plus de rivière, l’Enfer, saison été, j’ai des tas de photos de danseuses à visage d’ange qui évoluent sur des morceaux joués par Bombarde et Biniou, les deux fameux duettistes bretons dont le chapeau est rond… de Saint-Vincent (cf supra).
Et si l’agent 212, celui qui veille toujours au grain, était venu ce dimanche-ci vérifier si les jeunes adeptes du flirt, de l’amourette ou de la glande qui avaient posé leur derrière sur le gazon des pelouses autorisées ou s’en étaient fait une couchette portaient bien un masque sur le nez, croyez-moi, il aurait pu en distribuer, des amendes à 135 euros.
Avant de regagner vos autocars ou vos pénates, n’oubliez pas d’aller jeter un œil à la volière qui rime si bien avec «gruyère» et «bruyère», à la statue de Glenmor, au carré Du Guesclin, aux grottes ou à l’allée des chênes ni surtout de saluer Monsieur Zébulon, le délicieux manège où je vis autrefois une bonne sœur attendre son tour pour tournicoter sur la grande girafe !
Pondu pour l'Atelier de Villejean du mardi 23 mars 2021
d'après la consigne n° 2021-23 ci-dessous