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Mots et images de Joe Krapov

15 juin 2020

AUGUSTIN TRAQUENARD : LE RÉCIT DE MATHILDE FLEURVILLE

 

La dernière fois que j’ai vu Augustin Traquenard c’était ce soir étrange où il a fait si chaud. Je rentrais du travail après avoir récupéré Georges, notre bébé, à la crèche. Nous habitions alors un appartement à l’étage au n° 4 de la rue des Petits-Champs à Paris. Augustin s’apprêtait à promener notre chien, un fox-terrier bizarrement tout blanc que nous avions appelé Emile. On s’est croisés sur le palier.

- Je vais acheter des allumettes. Prépare les pinces en or, je ramènerai aussi du crabe.

Il n’est jamais revenu.

***

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Il avait arrosé encore tout de travers la pauvre plante en pot qui ornait notre home. Il en mettait partout avec sa cruche antique, de l’eau, sauf là où il fallait. Chaque fois je l’engueulais. Il protestait :

- Hé ! Ho ! Tu ne vas pas en faire toute une affaire de ce que l’eau dégouline sur ton tournesol ?

- D’abord ce n’est pas un tournesol, c’est un azalée et c’est le pied de la plante qu’il faut arroser, pas la fleur !

- Tournesol, lotus, bleuet, orchidée , c’est pareil, espèce de maudite Mathilde ! Fleur vile ! L’azalée, c’est une valse !

Je ne lui répondais pas que la valse, justement, quand nous la dansions, il m’écrasait les pieds. Avec Augustin, il valait mieux ne pas envenimer les situations.

Le soir est tombé puis la nuit. L’angoisse montait. La clarté des étoiles semblait mystérieuse. Par la fenêtre ouverte je scrutais les mouvements de la rue, guettant son retour.

Devant le café où nous avions nos habitudes, le Pharaon, un voyou guettait un client de passage qui fumait le cigare en terrasse. La lune était pleine. Il y avait sans doute du drame dans l’air mais je n’étais pas objective. On a marché sur la moquette du palier mais ce n’était pas lui.

Les lumières de la ville se sont éteintes. J’ai fini par aller me coucher.

***

Il n’a pas donné signe de vie pendant trois jours. Le quatrième une carte postale est arrivée. La Grand’place de Bruxelles au recto. Au verso, ces quelques mots : « Ne t’inquiète pas. Je t’expliquerai. »

Pourquoi donc était-il parti ?Je subvenais à tous ses besoins, même les plus illégaux. Mes parents nous aidaient bien. J’avais toujours de la coke en stock. Je ne lui coûtais rien en bijoux, je n’aime rien tant qu’être habillée simple. Bien sûr les vagissements du bébé la nuit lui cassaient un peu les oreilles mais c’étaient les dents, ça passerait.

Oui, c’est vrai, il buvait, il était violent, m’injuriait et me battait même parfois. A part cela c’était le plus délicat et le plus délicieux des hommes en public. Une espèce de milord noir. D’âme, je parle, pas de peau. Il n’avait rien à voir avec Sydney Poitier.

***

Bruxelles. Pourquoi la Belgique plutôt que l’Amérique ou le Congo ? Est-ce qu’il y avait une autre femme derrière cet envol ?

J’ai fini par aller trouver le détective du rez-de-chaussée. Son agence s’appelait Fiat Panda.

- C’est à moitié en hommage à Léo Malet et à son agence Fiat Lux et à moitié parce que je suis rangé des voitures. Je suis un ancien des R.G.

- Les Renseignements Généraux ?

- Non, les Recherches Graveleuses. Florent Fouillemerde pour vous servir. Vous par exemple, votre compagnon est parti et vous vous demandez avec qui.

Il y avait des boules de cristal qui lui servaient de presse-papier sur son bureau. J’en ai compté sept. J’étais chez Madame Irma la voyante ou quoi ? Il devinait toutes mes pensées.

- Je les collectionne. J’en ai 714. Vous avez une photo du disparu ? Et une photo du chien ? C’est surtout lui que vous voulez retrouver, non ?

***

Cher mais efficace, le détective. Comme quoi il ne faut pas se fier aux apparences ni au patronyme des gens. Il m’a rappelée quinze jours après.

- Le 21 au soir, après être sorti de chez vous, Monsieur Traquenard a pris l’autocar pour Bicêtre.

- L’hôpital ?

- Non, Le Kremlin-Bicêtre. Là-bas il a retrouvé un ami à lui fraîchement débarqué des Ardennes. Un nommé Archibald Rimbock, pas forcément recommandable d’après mes renseignements. C’est un type barbu qui porte un monocle, une casquette de marinier de la Meuse et n’a que l’invective à la bouche. Le lendemain matin on retrouve leurs traces à la gare du Nord où ils se sont accrochés avec un photographe de rue nommé Karjaboudjan. Rimbock l’a blessé à la main, d’un coup de couteau. Ils ont filé ensuite, le laissant tout saignant, et ils ont sauté dans le train pour Bruxelles. Là-bas ils ont vécu un temps au 26 rue du Labrador. Puis ils sont partis pour Londres.

- Filer le parfait amour ?

- Rien n’est moins sûr, madame Fleurville. C’est une affaire assez bizarre et… c’est pire encore que tout ce que vous pouvez imaginer. Ils vivent très honorablement, là-bas. Ils fréquentent les bibliothèques et ils donnent des cours de français. Et… êtes-vous prête à entendre l’insupportable ?

- Allez-y docteur ! Euh… Madame Irma. Pardon, ça m’a échappé, M. Fouillemerde.

- Je comprends que vous soyez troublée et vous allez l’être encore plus. Ces deux messieurs… Comment vous le dire ? Ils écrivent de la poésie.

***

murmure_temps 0008 détail

Augustin Traquenard ! J’ai vite fait une croix sur ce dégénéré. Je me suis mariée l’année suivante avec un industriel belge nommé Rémi Tatin.

Le plus désolant dans l’histoire a été de perdre le petit chien blanc si intelligent, Emile, dont Fouillemerde n’a pas pu me dire ce qu’il ‘était devenu. Il ne me reste de cette époque que cette photo un peu floue de lui : c’est celle que j’avais confiée au détective et qu’il m’a rendue. Je me souviens qu’on l’avait même fait agrandir et encadrer, quand nous habitions rue des Petits-champs, Augustin, Georges et moi.

C’est du passé. Rémi et moi sommes heureux. Nous habitons avenue Louise à Bruxelles, c’est dire ! Nous venons de donner une petite-demi-sœur à Georges. Elle est adorable. Nous l’avons prénommée Emmylou.

Emmylou Tatin, ça sonne bien, non ?


Pondu pour l'Atelier d'écriture de Villejean le 14 et le 15 juin 2020

à partir de la consigne ci-dessous.

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15 juin 2020

CONSIGNE D'ÉCRITURE 1920-34 DU 9 JUIN 2020 A L'ATELIER DE VILLEJEAN

Murmure du temps

 

L'animateur distribue aux participantes des images extraites d'un livre intitulé "Le Murmure du temps". Elles sont dues au talent de M. Herra. On peut en admirer certaines ici : https://tin-7.soforums.com/t354-Les-Murmures-des-Temps.htm

On reconnaît de manière assez évidente la source d'inspiration de l'artiste : les albums d'aventures de Tintin et Milou.

Il est demandé d'en choisir une et d'écrire une histoire, un poème ou tout ce qu'on veut à partir d'elle mais sans jamais citer dans le texte les noms des personnages d'Hergé !

 

Murmure du temps 11

14 juin 2020

HÄRDÖPFELER !

- Pour savoir ce qu’un mari vaut
Il faut, Marie, que tu convoles
En préalables noces.

Si dès après le mariage
Il s’envole et va pratiquer,
Avec d’autres, marivaudage, 
C’est que c’est là mari volage.

Marivalise d’habileté
Pour le reprendre à Marylise
Ou Marie-Thé !
Marive-leur le clou en beauté !
Ironise !

Le mari vautré dans le canapé,
Marie, vaut-il mieux qu’un mari vaurien
Chez les Canadiens 
Ou qu’un mari vautour
Sur les bords de l’Adour ?

Ou bien est-ce qu’à la fin des fins
On peut décréter qu’un mari n’vaut rien ?

Si le mari vaut tant,
Passé dans l’isoloir,
Pourquoi tant d’abstention ?

Obtient-on réduction de peine
Si le mari s’tourne ?

Sait-on de quoi on se prive
A l’hôtel des culs tournés ?

Cinq minutes d’arrêt buffet !
C’est la pub à la télé,
Les jeux des feux de l’amour
Et de l’hagard Saint-Lazare.

Il est bon, cet Härdöpfeler !

200614 kartoffelbrand

 

Ici-gît le mari vosgien
Qui éclusa trop de p’tits verres
Ballon du côté d’Guebwiller

Ici gît le mari veau doux
Sacrifié fort cruellement
Sur l’autel par trop succulent
Du traité comme un coq-en-pâte.

2020 06 14 coqen pâte

Ici-gît l’affreux mari volatile
Qui m’enferma comme perruche
Dans une jolie mari-volière
Pour s’en aller chasser l’autruche.

Heureusement pour vous, maritornes,
Le mari veau d’or est toujours debout
Et - c’est là secret de licorne -
Le mari totem est tabou !

Les marivaux de Paintful Gulch
Ont, les uns, un long nez
Et les autres grandes oreilles

2020 06 14 ob_64da37_vittorio-leonardo-lucky-luke-les-rivau

Personne ne comprend au Bhoutan
Le mari volapük
Ni le charabia déroutant
Des opéras de Christoph Glück.

Veux-tu, Marie, que je m’arrête ?
Je vois que tu te prends la tête 
Lorsque mes mots marris volètent !

Sois heureuse ! Fin de l’opus !
J’m’arrive au bout de mon laïus !

Cessons-là ces billevesées !
Reprendras-tu un peu de ce vieil alcool suisse ?

- Oui, mais juste un marivaudoigt !

2020 06 14 Pierre_Carlet_de_Chamblain_de_Marivaux_-_Versailles_MV_2985


Ecrit le 14 juin 2020 entre Rennes et Nantes
pour le cas - pas improbable ! -  où l'oncle Walrus nous proposerait ce mot

Härdöpfeler

lors d'un prochain Défi du samedi ! ;-)

13 juin 2020

Découverte d'un graff de centre ville à Rennes le 25 mai 2020 (1)

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Ces "Personnages flottants au-dessus de la ville de Rennes" sont installés dans une entrée d'immeuble de la rue Le Bastard. Le portail étant toujours fermé, je n'avais jamais eu jusqu'à présent l'occasion de les admirer.

13 juin 2020

Découverte d'un graff de centre ville à Rennes le 25 mai 2020 (2)

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Des Twin towers à Rennes ?

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Les Champs libres et la Sécu !

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13 juin 2020

Découverte d'un graff de centre ville à Rennes le 25 mai 2020 (3)

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A gauche la Tour des Horizons

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Cage d'escalier rennaise

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L'église du Vieux Saint-Etienne ?

12 juin 2020

JE PLAIDE HAIKU-PABLE : RÉINSTALLATION

Archivistique. Déjà, mettre de l'ordre dans cet ordi avant qu'il ne me lâche, ce serait pas mal. Ce recueil de haïkus retrouvé dans un dossier nommé "Transferts" a été publié en flash sur Le Défi du samedi n° 278, fin 2013, et n'est plus visible désormais.

Profitons des possibilités nouvelles de publication de fichiers pdf sur Canalblog pour le faire revivre encore un peu ! Je pense que ça vaut le détour, ne serait-ce que pour la photo de Joe Krapov l'hédoniste qui figure à la fin !

Je_plaide_ha_ku_pable_4

 

 

11 juin 2020

Sur la plage à Saint-Malo le 25 mai 2020 (2)

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- Je suis à la mereuh ! Tralalalèreuh 

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10 juin 2020

Sur la plage à Saint-Malo le 25 mai 2020 (1)

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Les nouveaux gestes barrières de la marche nordique ?

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C'est ici, la plage du Sillon ?

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Stand de distribution de palmes (non) académiques.

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9 juin 2020

JE SUIS HEUREUX QUAND...

Je suis heureux quand 

- j’éteins le bouton de la radio parce que quelqu’un·e dans le poste parle de coronavirus ;

- je plie le "Canard enchaîné" soigneusement pour pouvoir lire la page 2 à la suite de la 1 dans le canapé. Plus tard je lirai la 8, puis la 7, la 6, la 5)dont je n'ai regardé que les dessins. La lecture de la 3 et de la 4 attendront mon passage aux toilettes mais je ne serai pas très heureux de les lire car elles sont moins drôles que les autres ;

- je prends le café du midi après l’avoir confectionné à l’ancienne, avec même désormais une cuillère à café de chicorée par-dessus le café moulu ;

- je savoure la tarte aux pommes maison faite par la conteuse avec laquelle je vis ;

- je reçois des amis qu'on n'a pas vus depuis trois mois et je découvre le nouveau chien qu’ils ont avec eux : ouf, ça n’est pas un doberman ! ;

200607 Nikon 056

- je laisse tomber mes réticences vis-à-vis de Windows 10 ;

- j’entame une partie d'échecs sur un des nouveaux logiciels gratuits du "Microsoft store" ;

AEV 1920-33 Jean-Paul - Les échecs LV100

- je trouve des formules à l’emporte-pièce pour critiquer le langage journalistique : Personne âgée ! Personne âgée ! Appelez-moi « vieux », je préfère. Un vieux con c’est un vieux con, ça n’est pas "une personne âgée avec un entendement diminué" ! ;

- je trouve la bonne réponse à la question Superbanco du jeu des mille euros. 

- je chante "Ca vaut mieux que d'attraper la scarlatine" et "Je m'voyais déjà" en plein air au square du Berry.


Pondu le 9 juin 2020 pour l'Atelier d'écriture de Villejean 1920-33 d'après cette consigne.

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