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Mots et images de Joe Krapov
27 décembre 2021

Les illuminations de l'hôtel de ville à Rennes le 26 décembre 2021 (2)

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25 décembre 2021

HYPO-CON-DRIAQUE

01 lumbago-lombalgie1

Quand on en a vraiment plein l’dos
On s’ paye un point de lumbago

Quand on est victime de stress
On déclare un vilain herpès

Bien souvent sur le bord d’la lèvre
Ça s’appelle un bouton de fièvre

Le reste du temps on va bien
Alors on va chez le médecin

Refrain 1

Et à part-ça, Docteur, quoi d’neuf ?
Est-ce que votre coeur fait teuf-teuf
Quand vous buvez du Châteauneuf
Ou lorsque que vous courez la meuf ?

Chassez-vous toujours les Papous
Afin de leur prendre le pouls
Et les amulettes magiques
Qui remplacent tous les antalgiques ?

Prenez-vous toujours, pour être zen,
De l’Efferalgan sans gluten,
D’la Boldoflorine bigoudène
Et du vieux sirop Théralène ?

Prescrivez-vous l’bicarbonate
Pour le cancer de la prostate
Et conseillez-vous le clystère
Pour Bach à la cantate prospère ?

2

Docteur Jekiffe et Mister Aïe
On lui déballe son attirail

De malaises de petit bobo
Pour qu’il nous r’file un placebo.

On le sermonne et on le tance
Pour qu’il nous fasse une ordonnance

S’il se permet de résister
Lors on s’enquiert de sa santé

Refrain 2

04 whats-up-docSo ! Really ? Tell me, what’s up, doc
Have you some gonocoques en stock ?
Conseillez-vous, en cas d’mal-être,
De prendre l’autocar pour Bicêtre ?

Faut-il aller jusqu’au Congo
Pour soigner son impétigo 
Et interdire à l’Amérique
L’usage du barbiturique ?

Avez-vous les oreilles cassées
Par les angoisses ressassées
De vos confrères installés
A demeure dans les télés ?

Est-ce qu’on a marché sur la tête
Depuis qu’est arrivé la bête ?
Faut-il faire pour le sanitaire
Tintin au pays de l’ornière ?


3
Lorsque je vois l’état immonde
Dans lequel se trouve le monde

Quand j’écoute à la radio braire
De sinistres apothicaires

Plutôt que des les insulter
Je préfère aller consulter

Ces habitués du bizarre
Qu’on appelle « les hommes de l’art »

Refrain 3

9B whatsupdocEt à part ça, Docteur, ça va ?
Dansez-vous toujours la java ?
Faites-vous rimer « douille » et « andouille »
Même si ça n’remplit pas vos fouilles ?

Peignez-vous jusque sur les murs
Le besoin d’respirer l’air pur ?
Pour ceux qui ne dorment plus guère
Prescrivez Proust en somnifère ?

Et pour le monde qui va mal
Avez-vous un remèd’ de ch’val ?
Se mettre au lit, manger et boire 
Et Rimbaud en suppositoire ?

Ah, Docteur Batifolamour !
Vraiment, vous m’étonnerez toujours !
Je crois que vous perdez la boule
Vite ! Vite ! Une cure à la Bourboule !

 



Ecrit pour le Défi du samedi n° 695 d'après cette consigne : lumbago

24 décembre 2021

UN ARBRE A PALABRES A VILLEJEAN !

Un arbre à palabres à Villejean !

Une belle ambiance de fête régnait ce vendredi 17 décembre 2021 dans le square du Dauphiné. On y comblait un manque certain, on célébrait une naissance, on importait ici le meilleur concept de l’Afrique !

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 Un collectif d’habitants et d’habitantes du quartier réuni·e·s autour de Maryvonne Robert a en effet eu l’idée de planter ici un albizia dont le destin est de devenir un arbre à palabres. A cet effet la placette qui est située derrière le square Zamenhof face au jardin partagé dit « Jardin des noisettes » a été dotée de bancs et d’une bibliothèque de rue.

Annaïg, Robert et Maryvonne, bénévoles du centre social et animateurs de ce jardin familial, lieu de convivialité et d’échanges, créateur indéniable de lien social, ont demandé aux jardiniers de la ville d’installer cet arbre qui promet dès le printemps prochain de se couvrir de fleurs à pompon d’un joli rose.

2021-12-17 - 285 10La diversité culturelle de Villejean est une richesse à préserver et les structures ou associations du quartier y travaillent efficacement. L’arbre à palabres prend sa part dans ce projet commun.

L’armoire à livres a été fabriquée à la ferme de la Harpe par les bénévoles de l’association Culture Manuelle et Technique (Jacques, Jean-François, Babken et Robert) et peinte par Maryvonne. Chacun peut désormais la garnir de livres à partager et publier, sur ses côtés, des annonces de manifestations publiques.

Les dames du collectif Kune se sont chargées du buffet de pâtisseries et du thé marocain de cette inauguration. Les commerçants du marché de Villejean ont également offert des plateaux de leurs produits et en ont été récompensés par une exposition photographique de leurs portraits. Un musicien et une chanteuse ont semé dans l’air quelques notes et refrains sympathiques et l’arbre à palabres a déjà fait l’objet d’une chanson-hommage interprétée en préalable aux discours de rigueur.

La mention « Je suis un arbre à palabres » a été traduite et inscrite en différentes langues sur le tuteur de l’arbre (arménien, arabe, portugais, albanais, congolais, breton – la traduction fut paraît-il compliquée dans cette langue ! –, gallo, etc.).

La cérémonie s’est bien sûr clôturée avec l’interprétation de « Auprès de mon arbre je vivais heureux » de Georges Brassens. Souhaitons une longue vie de bonheur à cet arbre et à celles et à ceux qui palabreront sous son ombre !

Joe Krapov

 


Ecrit pour Histoires ordinaires/Villejean  le 20 décembre 2021.

21 décembre 2021

Choses vues à Rennes le 18 décembre 2021 (3)

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Samedi 18 décembre 2021. Inauguration de la nouvelle station Sainte-Anne qui donne accès à la ligne B du RER métro rennais et du nouveau manège de M. Régis Masclet installé sur la place du même nom (Sainte-Anne, il n’y a pas de place Masclet à Rennes).

Chargés de nos petits paniers car de retour du marché des Lices, nous pénétrons dans la station et descendons dans les profondeurs. L’escalier roulant va trop vite à mon gré donc j’emprunte les marches en levant et posant le pied gauche puis le pied droit, ça va aussi vite du reste dans ce sens là. Aux différents paliers, je prends des photos avec mon petit APN compact. Quand nous arrivons sur le quai nous sommes rejoints par une petite troupe de bobos rennais dont plusieurs munis d’appareils photographiques efficaces mais sans doute coûteux et dont le centre d’intérêt semble être une petite dame à cheveux courts et à lunettes qui porte un joli manteau rouge.

Ignorant cette cohorte – nous sommes un peu snobs, parfois, nous les Krapov, ou simplement nous bornons à ne pas emmerder nos voisins quand ils ne nous demandent rien, nous poursuivons notre visite sans nous soucier plus de ces braves gens.

Or voilà, ce n’est pas le tout de descendre faire un voyage au centre de la terre il faut parfois aussi ressortir à l’air libre ne serait-ce que pour rentrer chez soi cuisiner les victuailles qu’on vient d’acquérir. Sauf que les organisateurs de cette visite nous ont concocté de leur côté un véritable labyrinthe digne de rats de laboratoire. Les ascenseurs ne sont pas utilisables ce jour. Certains escaliers mécaniques non plus. Il faut aller au bout du quai monter quelques marches puis redescendre sur le quai d’en face. Puis remonter encore sans savoir le moins du monde où l’on est.

On croit voir le bout du tunnel en apercevant un escalier mécanique mais une ceinture de rubans rouges et un vigile en interdisent l’accès. On proteste : mais c’est par où la sortie ?

- Vous redescendez là puis vous remontez !

La petite dame en rouge qui nous a rejoint·e·s avec ses groupies ne s’embarrasse pas de ces formalités et passe sous le ruban.

- Non, Madame, vous n’avez pas le droit de passer là !

- Mais je dois remonter vite, on m’attend là-haut pour le discours !

- Puisque je vous dis...

Après quelques échanges rapides, l’agent devient plus conciliant, la dame et sa troupe disparaissent, nous laissant nous, les non-privilégié·e·s, errer encore quelques minutes dans le labyrinthe de la grand-mère à Jésus.

Je ne sais pas si c’est rassurant pour elle mais pour nous, ça nous a bien fait rire que le vigile ne reconnaisse pas Nathalie Appéré, maire de Rennes et présidente de Rennes Métropole !

Quand je vous le dis que je peux écrire n’importe quoi ici ou ailleurs vu que les Français ne lisent plus !

Nathalie, tu ne gagneras jamais le concours de "Ma binette partout" du "Canard enchaîné" !

A part ça la station est très belle et c’est tant mieux !

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21 décembre 2021

Choses vues à Rennes le 18 décembre 2021 (4)

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20 décembre 2021

Choses vues à Rennes le 18 décembre 2021 (1)

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Ce matin-là, on a découvert le nouveau manège installé sur la place Sainte-Anne par M. Régis Masclet.
Je crois me souvenir que je l'ai déjà vu une année à Noël place du Parlement. Mais je ne me lasse jamais de photographier les manèges et carrousels ainsi que leurs délicieux frontons.

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20 décembre 2021

Choses vues à Rennes le 18 décembre 2021 (2)

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19 décembre 2021

E= MC2 MON AMOUR

Jeu 71 de la Licorne - bisou

Entre deux bisous sur la bouche, les enfants qui s’aiment se disent des mots doux sous l’évier.

- Comme je t’aime, mon théorème !

- Tu es ma seule et unique muse, mon hypoténuse !

- Je t’adore, mon Pythagore !

- Je te trouve suprêmement belle, mon isocèle !

- Oh comme tu m’obsèdes, mon parallélépipède !

- Que tu es intelligente, ma jolie tangente !

- Tout me plaît dans ton physique ! Si je m’écoutais, je t’écrirais des quantiques !

- Tu me démultiplies, ma trigonométrie !

- Tu me fais monter au ciel, mon gros exponentiel !

- Si tu savais comme je te calcule, mon intégrale !

- Tu me fais vibrer le plexus, mon savant Cosinus !

- Je te désire avec passion, mon équation !

- E = MC2, mon amour !

- Aplusbégalix, le combat des chefs !

- Mon penchant pour toi forme le même angle avec le sol horizontal que la tour de Pise !

- Permets donc que je te bise !

- Pi = 3,1416 !

- Permets donc que je t’appelle Thérèse et que je t’écrive une lettre à Elise, mon trapèze !

- Mon angle obtus, tu me mets le feu aux joues !

- Tu me donnes des transes, ma circonférence !

- Je te chéris, mon décamètre !

- T’aimer me donne des ailes, ma belle parallèle !

- Je te vénère, mon octogone même pas Lyonnais !

- Si tu savais comme bien je te blaire, ma douce perpendiculaire !

- Bon c’est pas le tout ça, Daniel ! Tu la sors de son étui, la chignole et on le fait, ce trou ? Sinon je vais penser que ta méthode mathématique n’est rien qu’un tuyau crevé !

La maman de Daniel entre dans la pièce et s’écrie :

- Mais enfin ! Qu’est-ce que vous faites sous l’évier, les enfants ?

- On essaie de résoudre le problème de maths que nous a donné notre maître, Monsieur Einstein !

- Et quel est-il, ce problème ?

- « Un lavabo fuit à la vitesse d’un cm3 par minute. Sachant que le TGV qui met 3 heures 23 pour aller de Paris à Marseille part de la voie 9 à 8 h 47, dites au bout de combien de temps l’escargot atteindra le sommet du panneau et, sachant que tout est relatif, donnez l’âge exact du capitaine du Titanic né le 27 janvier 1850 à Hanley au moment où le lavabo débordera et où l’iceberg percutera le navire, faisant chuter l’escargot et dérailler le train. ».

- Et vous avez besoin de faire un trou dans la tuyauterie pour ça ? Daniel, va me ranger cette chignole immédiatement dans la caisse à outils de Papa et toi Lauren, il est l’heure de rentrer chez toi, maintenant.

- Bien, Madame Michon ! A demain Daniel ! A demain Madame Michon !

Lauren sort et Daniel remballe ses outils.

- Surdoués ! Surdoués ! maugrée Madame Michon. Je veux bien l’admettre puisque les psys le disent. Mais j’ai surtout l’impression qu’ils sont surdoués pour les conneries, ces deux-là !

 
Ecrit pour le jeu n° 71 de Filigrane (la Licorne) à partir de cette consigne.

18 décembre 2021

KYRIE ELEISON

Quelle kyrielle de fous-rires n’a-t-on pas entendue ce soir dans mon «home sweet home» tandis que je cherchais, dans les archives du Défi du samedi, sous la catégorie «Joe Krapov», une photo qui ne s’y trouvait pas !

En ai-je déposé, au fil des ans, des bêtises chantées, écrites ou déclamées, des photos drôles, des collages, des lettres à Rimbaud, des rêves de Marcel P. et des exercices stylistiques autour de Saint-Georges et de ses dragons ! Et qu’est-ce que c’est drôle pour moi de les relire ou réentendre !

Inquiétez-vous, braves gens : ce n’est pas fini ! Je suis en excellente santé et toujours aussi prolixe de la plume ! Et le taulier ne me met pas dehors même si je reste jusqu'à la fermeture le vendredi soir !

Simplement je suis étonné par la kyrielle de vidéos qui ont disparu de la plateforme de M. Youtube tout comme par l’inefficacité, désormais, du moteur de recherches de M. Google qui semble avoir désindexé beaucoup de mes photos et ne ramène que peu de résultats sur des recherches d’images.

Mais bon, c’est la vie, tout passe, tout casse, tout lasse.

Parmi les fous-rires que je me suis payé, il y a surtout eu la disparition «partielle» de « (Mon cul) Sur la commode » de Jeanne Aubert.

Figurez-vous que cette vidéo n’est plus visible "que sur Youtube" parce qu’elle est «soumise à une limite d'âge (conformément au règlement de la communauté)».

https://www.youtube.com/watch?v=Z9FLsIqsTEE 

 

DDS 694 Rene-Magritte-Le-violC’est quoi cette kyrielle d’hypocrisies ? Y a-t-il là-dedans des seins à couvrir que nous ne saurions laisser voir à nos enfants ? Des seins non mais des culs, oui ! Dans ce cas couvrons, coupons, cachons, Dame Anastasie ! Mais non, on ne censure pas ! Les «kids» peuvent continuer de voir la vidéo... sur Youtube mais pas sur le Défi du samedi !

Ma vidéo sur «Nagasaki ne profite jamais» de Sttellla a subi le même sort ! Parce qu’on y voit le tableau «Le viol» de Magritte ! Excellent !

Je ne sais pas si j’ai bien raison de rire, en fait. On a les talibans qu’on peut mais surtout les nôtres sont, à mon humble avis, en train de se déclarer propriétaires du travail des internautes sans que nous ne puissions rien dire « au nom de la bonne moralité » et du « règlement de la communauté » établi par eux.

Ca fait penser aux clauses d’utilisation de Google photos où l’on peut lire que cette maison s’approprie le droit d’utiliser les photos que nous déposons sur leur plateforme pour un simple partage avec nos proches ! "Par le biais de cette licence, vous autorisez Google à utiliser vos droits de propriété intellectuelle sur vos contenus (tels que les droits d'auteur et les marques enregistrées), ainsi que les droits immatériels que vous détenez sur vos contenus (tels que les droits à l'image)".

Je ne sais pas si ce n’est pas une kyrielle d’énervements des nerfs qui va succéder à celle des fous-rires !

En tout cas, j’ai fini par retrouver la photo du mec qui joue de la guitare avec des lunettes à monture d’écaille, la raie à gauche et le pull à lignes horizontales.

Je ne sais pas non plus si, par décence, je ne devrais pas moi-même la censurer ! ;-)

DDS 694 JK 110309692

Ecrit pour le Défi du samedi n° 694 d'après cette consigne : kyrielle

15 décembre 2021

SOUS LA PLUIE

210722 Nikon 082 recadrée

Ils me plaisent bien, ces deux-là ; je leur adresse mes vœux muets de bonheur tandis qu’ils tournent dans la rue Dupuis, pressent le pas sous l’averse qui éclate.

Et puis non, tiens ! Je vais aller leur dire tout de go qu’ils ont raison de s’aimer malgré les bonnes sœurs qui vous confisquent « Madame Bovary », malgré les curés qui mettent Emile Zola à l’index et l’index où il ne faut pas, malgré les talibans et les pétainistes.

Alors moi aussi je tourne dans la rue Dupuis et là j’ai la surprise de ma vie ! Je ne suis plus à Paris, je suis au Japon ! Les enseignes pleines d’idéogrammes clignotent, se reflètent dans les flaques. La pluie a constellé mes lunettes de gouttes qui me donnent une perception hamiltonienne du dépaysement soudain. Et malgré cela, le couple de jeunes gens, je l’identifie : c’est Pierre et Manon !

Qu’est-ce qui est arrivé à la rue Dupuis ? Suis-je tombé avec elle dans une faille spatio-temporelle ? Est-ce parce que j’ai mentionné David Hamilton, photographe des années 70 assez flou en son centre et peut-être pédophile sur les bords que je me retrouve entouré de Renault 16, de DS 19 et de Simca 1000 dans un Japon de pacotille ?

Et si Pierre et Manon ont vingt ans, est-ce que j’ai moi aussi retrouvé cet âge-là ? Pierre est né juste un jour avant moi. Un coup d’oeil dans une boutique de miroiterie me le confirme. J’ai sur mon nez mes premières lunettes à monture d’écaille, je suis coiffé avec cette raie à gauche dans les cheveux et cette mèche qui tombe sur l’oeil droit, je porte encore un pull à bandes horizontales et un K-Way vert franc sur un jean en velours. Il manque juste le sous-pull à col roulé mais c’est parce que le pull l’est déjà, à col roulé.

Par contre, dans la tête, je le sens bien, je suis toujours le même vieux crabe qu’en 2021 ! Est-ce que j’ai le droit, du coup, de m’approcher de mes anciens amis et de leur dire ce que je sais de leur avenir ?

Me croiront-ils seulement ? Sous le parapluie, le couple arrêté échange des baisers quasi-clandestins. Si je les préviens de ce qui les attend, je me demande si Pierre et Manon iront sur leur île grecque, s’ils y vivront un jour d’amour et d’eau fraîche et puis, à force d’y retourner tous les ans, d’autres jours de reproches et d’engueulades jusqu’à leur rupture définitve avec des mots cruels et aucun retour en arrière possible pour eux.

Ils ont repris leur marche à pas rapides. La fatigue commence à alourdir les miens. Je m’élance derrière eux, les rejoins, dégoulinant de pluie. Je tape sur l’épaule de Pierre.

Ce n’est pas Pierre, ce n’est pas Manon. Ce sont deux Japonais ! Je m’excuse en agitant stupidement les mains et en répétant plusieurs fois « Sorry ! Sorry ! ».Visiblement ils ne comprennent rien à la situation puis ils sourient et vont s’abriter sous le dais trempé d’un hôtel de luxe.

Que faire ? Que faire d’autre pour ne pas avoir l’air d’un con « lost in translation » sans aucune Scarlett qui me réconforte d’une présence et me nourrisse d’espoirs inavouables ?

Oui, c’est ça, disparaître, poursuivre mon chemin et tourner à droite pour me trouver hors de leur vue. Et la première à droite, justement, c’est encore autre chose.

La jeune femme qui marche dans la rue Saint-Martin avec les gestes encore gauches de l’adolescence possède de grands yeux naïfs, prompts à s’émerveiller. Elle aussi, je la connais. C’est la marquise de B***, elle a trente ans, le teint frais, le nez court, les yeux noirs. Elle préfère l’été à l’automne et les remords aux regrets.

210722 Nikon 049 recadréeIl n’y a plus d’enseignes japonaises ici mais des maisons à colombage, une atmosphère de ville de province. Au bout de la rue on aperçoit la mer. En bordure de plage une oriflamme arbore au vent les deux lions jaunes sur fond rouge qui symbolisent la Normandie. Trouville ! C’est parfait, ça va me rafraîchir ou plutôt me sécher. Déjà il ne pleut plus et la rue Dupuis n’est plus qu’un lointain souvenir. Je rejoins ma jeune épouse. Nous sommes mariés depuis une semaine. Tout va très bien avec Madame la marquise ! La voilà, mon île grecque à moi !

Si je veux perpétuer cet état de bonheur, je sais ce qui me reste à faire : oublier l’avenir et ne plus jamais tourner dans une rue à droite !

 

Pondu à l'Atelier d'écriture de Villejean le 14 décembre 2021
d'après la consigne 2122-13 ci-dessous

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