Alors disons que c’est 1955 ou 56. Ce sont deux couples de jeunes mariés qui partent en vacances dans les Ardennes françaises. Avec une tente canadienne, ou deux, et une quatre chevaux Renault immatriculée 9553 EU 62. Le camping est à Monthermé, la barrière est celle de la Roche à Sept heures, le chemin grimpe au-dessus de la jolie boucle de la Meuse. J’ai randonné moi-même par-là avec Marina B. en 2017 quand nous sommes allés passer une semaine sur les traces de Rimbaud à Charleville-Mais’hier sans savoir qu’ils étaient passés par-là avant nous.
Photo empruntée sur Internet
Ce que l'on voyait depuis cet endroit-là en juillet 2017.
Cette même statue, vue depuis un bateau de croisière sur la Meuse en 2017.
Photo empruntée à Tripadvisor
La vue sur le coude de la Meuse est prise à Bogny-sur-Meuse et il y a sans doute eu un touriste aimable pour les immortaliser tous les quatre assis·e·s sur le socle de la statue des quatre fils Aymon, entre les pattes du cheval Bayard.
- Pourquoi tu publies ça sur Internet ?
- Pour rien ! Juste pour profiter du pion « Dépositaire » !
- T’as raison, il est un peu con ce Grand jeu de la Vie !
Si vous avez répondu "le verso des cartes "Chance" et "Caisse de communauté" provenant de deux jeux de Monopoly anciens", vous avez gagné ! Les deux jeux m'ont été ramenés de chez ses parents par Marina B. à qui je ne peux pas reprocher de ramener des "mérins" (des merdouilles, en gallo !) à la maison : c'est elle qui arrive à vendre mes vieux vinyles sur les braderies de Rennes ! C'est juste une application du bon vieux principe des vases communicants !
Du coup voici qu'arrive la krapoverie du jour : " Les réseaux sociaux, c'est des vaseux communiquant !"
Comme il manquait une carte chance et un titre de propriété au plus récent des deux jeux, je les ai refabriqués à ma sauce.
Oui, c'est vrai, en 1960 il y avait encore des locomotives à vapeur ! Et pas encore de taxe de luxe sur le plateau de jeu !
Ce que je me demande, c'est qui a déchiré cette carte !
L'un des quatre frères... ou la soeur ?
En tout cas il y a, avec ce jeu, matière à un atelier d'écriture !
La boîte n'avait pas de couvercle. j'en ai fabriqué un. J'ai photocopié l'étiquette de la grande boîte et l'ai collée dessus.
Avant cela j'avais cherché sur Internet cette image ci-dessous : je ne l'ai pas trouvée ! Tout ce qui existait avant 1995 n'intéresse que Le bon coin, Rakuten et Ebay !
Alors donc, comme pour la plaque commémorative de Rimbaud à Douai, me voilà devenu historien-photographe-archiviste travaillant pour... Pour qui au juste ? Tous les jeunes sont branchés sur les jeux vidéos ou sur leurs téléphones portables. Et en cas de grand effondrement, cette image ne sera pas plus accessible qu'auparavant !
Finalement c'est sur Pinterest que j'ai trouvé les choses les plus amusantes (et les plus futiles) concernant ce jeu.
Le capitaliste emblématique des temps modernes (ou des versions les plus récentes du jeu) : un vieillard à moustache blanche et haut de forme ? On est chez Mary Poppins, là ou quoi ?
En explorant mes archives de la Cantonade, je suis tombé sur cet air à boire anonyme daté d'octobre 1709 et auquel j'avais, en 1995, ajouté deux couplets. Je ne dispose évidemment pas d'enregistrements de l'époque (je parle de 1995 et non de 1709 !). C'est pourquoi j'ai passé ma matinée à taper la partition, écouter le rendu dans Noteworthy et chanter les trois voix pour enregistrer une version qui tienne à peu près debout.
En matière de vidéo, il n'y avait chez M. Youtube qu'une interprétation assez comique laissée là par de braves chanteurs estoniens.
Voici donc les paroles complètes et le diaporama chanté du jour !
Robin et Marion revenant de la foire
Air à boire anonyme d’octobre 1709
(version complétée des couplets 2 et 3 par Joe Krapov entre 1995 et 1997 )
1 Robin et Marion revenant de la foire Robin et Marion revenant de la foire Disaient une chanson qu'il ne fallait plus boire Disaient une chanson qu'il ne fallait plus boire Sinon du bon pour ce bon compagnon Pour ce bon compagnon Car tout homme qui boit Peut ignorer tout ce qu'il doit Car tout homme qui boit Peut ignorer tout ce qu'il doit Buvons, Soufflons, Vidons cette bouteille, dit-elle, dit-elle Vidons cette bouteille et nous la remplirons Buvons, Soufflons, Vidons cette bouteille, dit-elle, dit-elle Vidons cette bouteille et nous la remplirons
2 Si ç'n'est pas du Layon ce sera du Jasnières Si ç'n'est pas du Layon ce sera du Jasnières Le vin de la région est bon pour nos artères Le vin de la région est bon pour nos artères Sifflons, mon bon, force petits litrons Force petit litrons Car tout homme qui boit A toujours le coeur mis en joie Car tout homme qui boit A toujours le coeur mis en joie Buvons Chantons La foire est terminée dit-elle dit-elle La foire est terminée mais nous la referons Buvons Chantons La foire est terminée dit-elle dit-elle La foire est terminée mais nous la referons
3 D'avoir bu m'émoustille et tu es bien mignonne D'avoir bu m'émoustille et tu es bien mignonne Tu as I'oeil qui pétille et sembles polissonne Tu as I'oeil qui pétille et sembles polissonne Allons, tendron, à I'abri d'un buisson A I'abri d'un buisson Car tout homme qui boit Ne peut rester longtemps de bois Car tout homme qui boit Ne peut rester longtemps de bois Marion, allons ! Cupidon nous appelle dit-elle dit-elle Cupidon nous appelle, suivons son aiguillon ! Marion, allons ! Cupidon nous appelle dit-elle dit-elle Cupidon nous appelle, suivons son aiguillon !
Entre les deux étagères pleines de boîtes à archives, au grenier, il y avait un cartable en toile avec un autocollant « Pays de Loire » récupéré on ne sait où et apposé dessus.
A l’intérieur un gros classeur rose et une chemise cartonnée rouge. C’est ce qui me reste des chorales que j’ai fréquentées quand nous habitions dans la Sarthe.
Pour la première, Chœur à cœur d’Auvers le Hamon, il me reste des programmes de concerts et le plus ancien est d’avril 1993. J’y aurais sans doute mis les pieds en septembre 1992, entraîné par Gilou Syrinx et accompagné de Nestor Burma et Marina Bourgeoizovna. Oui, ce sont des pseudonymes.
La chorale était alors dirigée par Anne-Marie Hubert, par ailleurs professeur de guitare à l’école de musique de Sablé-sur-Sarthe. En 1995, cette charmante dame a monté un chœur d’hommes, la Cantonade, dans lequel Gilles et moi sommes allés également donner de la voix.
Le classeur et la pochette contiennent les partitions des chansons au programme de ces années-là. J’ai entrepris de les scanner avant de m’en débarrasser. J’ai commencé par le répertoire de la Cantonade :
Alle psallite cum luya (motet du XIIIe siècle d’un auteur anonyme)
L’Alligator (Robert Desnos ; Jean Gauffriau)
Amazing grace
Au pied d’un rosier (traditionnel)
Bonsoir le maître de maison (chant à répondre de Grande Lande harmonisé par B. Lallement)
Chœur de la chasse (extrait d’Hyppolite et Aricie) de Jean-Philippe Rameau
Cohors generosa (vieille chanson estudiantine hongroise harmonisée par Zoltan Kodaly)
Fidelio de Ludwig van Beethoven : Finale du 1er acte
Go down Moses (negro spiritual harmonisé par Christian Balandras)
Gwerz Jorj Courtois (Tri Yann)
Jacob’s ladder (negro spiritual arrangé par B. Oliveira)
Je rencontrai un gros Normand (anonyme du XVIIIe siècle harmonisé par Madeleine Périssas)
Laissons chamailler (traditionnel)
Le Moteur à explosion (Sylvain Richardot de Chanson Plus Bifluorée d’après Le loup la biche et le chevalier d’Henri Salvador et Maurice Pon)
Nietzvoda (chant polyphonique russe)
Pannan mwen dan lawmé (biguine ; paroles et musique de Al Lirvat)
Podmoskovnaya Berezka (A Fliakovskiï ; paroles de V. Kotov)
Potemkine (Jean Ferrat ; harmonisation Jean Golgevit)
Les Poupées rétro (Ricet Barrier)
Robin et Marion revenant de la foire (air à boire anonyme de 1709)
La Soupe au fromage (hymne culinaire de Schaunard ; paroles de Max Buchon. XIXe siècle)
Sweet nymph (Thomas Morley ; 1595 extr. de Premier livre de Canzonets)
Tibié paiom (liturgie orthodoxe slave de Dmytro Bortnianski (1751-1825)
Trans Europ Express (Claude Pascal ; 1980)
D’après les trois programmes de 1996 et 1997 il y avait aussi «Vive Heni IV !» et «Vykhojou odin ja na dorogou» mais j’ai dû mettre ailleurs ces deux partitions-là.
L’effectif de la Cantonade était de 36 membres en 1995 et de 34 en 1997. Je suis étonné d’y retrouver dans la liste des c hanteurs ce numéro de téléphone 02 43 95 27 21 qui était le mien, que je connaissais par cœur et que j’avais oublié depuis. Mais dont je vais me souvenir au moins toute cette semaine alors que c’est parfaitement inutile !
Si quelque musicien, choriste ou chef de chœur passait par ici, qu’il le sache : j’ai déposé ces partitions sur dl.free.fr. Elles sont récupérables pendant un mois sous forme d’un fichier zippé contenant les documents au format jpg.
Mon arrière-grand-père, Papy Lazare, celui qui a fait un farctus de la cocarde il y a trois ans, il nous a tous invités chez lui pour fêter la Noël au lendemain du réveillon.
Maintenant que Mamy Marie-Madeleine ne se souvient plus trop du prénom d’un gars qui s’appelle Al Ho-Hisse, c’est Papy qui nous fait la cuisine et qui distribue les cadeaux. J’ai encore eu droit à un livre en papier qui ne rentre pas plus que l’année dernière dans ma console de jeux mais maintenant j’ai l’habitude : j’essaye de le revendre après sur « Le bon coin » ou de l’échanger dans la cour de récré, son Almanach Vermot de l’année en cours. Les dessins plaisent bien aux copains.
Papy avait fait deux pintades, Papa et Maman avaient amené le champagne et les gâteaux apéro de luxe, l’oncle Paul un tiramisu aux kiwis et l’oncle Mathieu un gâteau aux noisettes et à la crème anglaise, qu’on va la garder quand même, la crème des Anglais, même si Thérésa May continue à « Brexiter les folliculaires » comme dit l’oncle Jean qui suit l’actualité internationale pour toute la famille.
Papy était tout pâle quand on est arrivés. « J’ai une rage de dents terrible ! » qu’il nous a dit.
- Ben faut aller chez le dentiste, Papy, a dit l’oncle Mathieu qui n’aime pas y aller non plus, chez le menteur qui arrache les dents.
- J’aime pas : c’est des jeunes ! On ne les connaît pas !
- Ah ben oui, mais si on va par-là, a dit Papa qui connaît tout Alphonse Allais par cœur, plus on ira et moins il y aura de gens qui auront connu Napoléon !
Papy a battu sa coulpe, bu sa coupe, mangé quelques pains d’épices au foie gras puis il est allé s’allonger parce qu’il n’était vraiment pas bien.
Sur le coup de cinq heures les tontons flingueurs et maman sont allés voir ce qu’il en était de Papy qui ne ressortait pas de sa sieste. Ouïe ! Ouïe ! Ouïe ! A la place du Bourgogne il avait pris son médoc pour le cœur mais ça ne lui faisait rien ! Tout le monde est sorti de la chambre très inquiet, la mine catastrophée. Maman a appelé le quinze, et, même si c’était pas un barbu, il y a un pompier qui est venu, puis un médecin et une ambulance pour emmener Papy au pital.
On a posé Papy sur un rancard, ils l’ont emmené allongé, tout jaune, et après tout le monde a pleuré sauf papa et l’oncle Paul qui ont continué à faire de la musique. Ils ont chanté la chanson de « Saturnin le canard » et des tas de bêtises écrites par des Charlots.
- Quand même, pleurnichait Mamy Marie-Madeleine ! On savait que ça devait arriver un jour ou l’autre mais choisir ce jour-là pour partir ! ».
Après l’oncle Mathieu est parti au pital avec mon cousin Luc, voir où ce que ça en était. Plus tard ils ont appelé Maman sur son téléphone de ministre pour lui demander d’amener les chaussons de Papy Lazare parce qu’ils l’avaient emmené pieds nus sur le rancard. Tant qu’à faire de partir les pieds devant en hiver, autant avoir de bonnes chaussures, vu le froid qu’il fait.
Quand Maman est revenue il y avait Mathieu, Luc et Papy Lazare, debout, presque vaillant, avec elle. Ils lui avaient filé de l’amorfine pour qu’il ne sente plus la douleur.
- Qu’est-ce que c’était alors, qu’il avait, Papy ? J’ai demandé.
- Ce n’était rien qu’une rage de dents !
Plus tard, dans l’auto, sur le chemin de la maison, Papa a dit à Maman :
- Ca fait plus de quatre-vingts ans qu’il a la rage dedans, ton grand-père. Pour une fois il l’avait dehors ! N’empêche, c’est dégoûtant ! Il est le seul à avoir reçu du père Noël de quoi se chouter légalement !
J’en ai déduit qu’on ne pouvait pas se chouter avec l’almanach Vermot ! C’est pas grave. Moi j’aime bien le monde comme qu’il est ! J’ai pas besoin qu’on me donne des coups de pieds avec rage dedans !
***
Maman a téléphoné ce matin pour prendre des nouvelles. Papy a quatre cons primés à la morphine à prendre pour tenir avant d’avoir un rendez-vous chez le dentiste. Mais il a dit qu’il ne les prendrait pas.
- Quelle tête de pioche ! a dit Maman !
Tout ça n’est pas grave. Moi j’ai retenu leur nom aux cons primés. La prochaine fois j’irai farfouiller dans leur armoire à pharmacie à Papy et Mamy. Je les récupérerai et je les offrirai à Papa pour la fête des pères !
Joe Krapov est poète, humoriste (?), musicien à ses heures et photographe à seize heures trente. On trouvera ici un choix de ses productions dans ces différents domaines.