LE DERNIER SILENCE D'ARTHUR R.
O terre des Ardennes à jamais détachée
De mes souliers crottés ! Ô gorge desséchée
D'avoir eu tant de science et de n'avoir dit rien !
Injustice rendue sous l'absence de chêne
Me voici désormais privé de tout soutien !
Porteurs de ma civière, allez, à perdre haleine !
Pour la dernière fois ma trace d'Aquilon
Au livre de l'Afrique une corne promène.
L’œil bleu, le sang gaulois vont rejoindre la plaine.
Vers la rivière fraîche au creux de son vallon
Le drapeau du Destin, criblé de trous, nous mène.
O Saisons ! Ô châteaux ! Pourrai-je m'effrayer,
Si un jour je découvre, étrange, horrible chose,
Sur ma saison d'enfer, sur ma tombe sans rose,
Une bibliothèque en guise de laurier ?
Ecrit pour les Impromptus littéraires du 29 janvier 2018
à partir de cette consigne
BRIN DE CONDUITE (1)
« Le petit bout de chair sans intérêt qui se trouve à la base du pénis s’appelle un homme » a écrit Jo Brand.
Hé oui, Mesdames, c’est ainsi ! Depuis la nuit des temps l’homme est appelé à se déplacer. Il va faire les courses au Mammouth ou la course au mammouth même si cet hypermarché et cet animal n’existent plus de nos jours.
Il part aux croisades, à la guerre, aux matchs de foot, aux 24 heures du Mans ou chez Ikéa.
Qu’est-ce qu’ils sont courageux, les hommes, derrière leur pénis et leur fragilité ! C’est vrai, "les hommes sont comme les femmes, il leur arrive aussi de pleurer, mais seulement lorsqu’ils essaient de monter un meuble en kit" comme a écrit Rita Rudner.
De nos jours les pérégrinations professionnelles ou autres de ces messieurs – et aussi de ces dames – peuvent s’effectuer en voiture. L’homme s’assied dans un fauteuil à roulettes entouré de tôle et de verre, il appuie sur des pédales, le véhicule avance, tourne grâce à un truc appelé volant et s’en va partout où on veut, parfois même dans le décor, surtout si c’est Jayne Mansfield qui est assise sur le siège à côté du conducteur. « Dans ce cas-là, les hommes sont des créatures à deux jambes et huit mains ». Quelquefois, en effet, le jobastre utilise aussi celles qui doivent rester sur le volant et - Boum ! - il s’emplafonne dans un platane ou dans un champ de doryphores ! « Va donc, eh, patate ! » entend-on beaucoup sur les routes.
Quand je dis l’homme, je devrais mettre une H majuscule car de nos jours la femme conduit aussi. Certains médisants comme Bill Vaugn considèrent que « Aujourd’hui, les femmes occupent des postes aussi importants que chefs d’entreprises ou chercheurs spécialisées sur l’atome. Il serait temps qu’elles sachent enfin faire un créneau ». Ce n’est pas très gentil ni très vrai.
BRIN DE CONDUITE (2)
Je ne vais pas vous raconter ma vie – quoique ! – mais dans notre couple, c’est plutôt mon épouse qui conduit. Moi je reste assis sagement à côté d’elle. J’ai tellement confiance dans ses qualités de chauffeuse que je ne regarde plus la route et même que j’écris des poèmes dans mon petit cahier jaune. Celui-ci est rempli d’ailleurs et je vais en entamer un neuf : il sera bleu désormais. Comme moi quand je lève le nez et vois que les distances de sécurité sont tout sauf respectées par le Fangio qui est à ma gauche.
Et donc, l’été dernier, après le délicieux concert auquel Marina B. et Gisèle C., émérites chanteuses, ont participé en Arques-la-Bataille, on se met en route tous les trois en direction de Varengeville-sur-Mer où il y a un beau cimetière marin devant lequel on tomberait volontiers en extase. On peut y voir la tombe de Georges Braque, peintre, et celle d’Albert Roussel, musicien.
BRIN DE CONDUITE (3)
Après le virage en épingle à cheveux de Pourville-sur-Mer la route monte à la va comme je te pousse sur la falaise. Vers le milieu de la pente voici l’Homme qui déboule ! Pardon, voici l’homme qui déboule d’une petite rue sur la droite et qui nous coupe la route, carrément.
- Crois-tu qu’il se serait arrêté, ce saltimbanque ? » commentons-nous intérieurement dans nos Ford intérieures.
Eh bien justement, cent mètres plus loin, il arrête sa voiture au milieu de la chaussée, forçant mon chauffeur préféré à stopper son propre véhicule. Le type descend, très calme, sort de sa bagnole et vient vers la nôtre.
Les zygomatiques de ces dames, à l’avant, se mettent à fonctionner à plein Youtube ! Un vrai film ou un sketch des Inconnus ! Le gars à une tête de hobereau local mais sans grâce et surtout sans le costume idoine : il est en short, torse nu, et arbore une bedaine de buveur de bière aguerri. Autant dire qu’il ressemble trait pour trait à un personnage en slip kangourou du regretté Reiser. Ah oui, ça me revient ! « Gros dégueulasse » qu’il s’appelait et ici la citation de Dave Barry ne s’applique pas vraiment :
« A en juger par les couvertures des magazines féminins, les deux sujets qui intéressent le plus les femmes sont :
- Pourquoi les hommes sont tous des gros dégueulasses ?
- Comment faire pour les séduire ? »
Voyant venir le coup et le macho dans ses œuvres, mes deux voitureuses cessent de s’esbaudir devant l’autochtone normand. Sentant qu’est venue l’heure à laquelle on se télescope chez les Hubbel, elles prennent l’attitude digne de deux bonnes bourgeoises qui sortent d’un stage de chant à quatre de l’Académie Bach avec Bruno Boterf comme chef, ce n’est pas rien quand même, non ?
BRIN DE CONDUITE (4)
Marina B. baisse son carreau pour entendre le revendicatif énoncer d’un ton posé mais péremptoire :
- Je suis désolé, Madame, mais cinquante mètres plus bas il y avait un panneau avec une croix de Saint-André. Ca veut dire que, venant sur votre droite, j’avais la priorité et il était normal que vous me laissiez passer.
- Je suis désolée, Monsieur, répond diplomatiquement ma chère et tendre. Je ne l’avais pas vu. Je vous présente mes excuses.
- C’est bon, répond-il avant de retourner à sa caisse qui a beaucoup vécu. Mais ce n’était pas la peine…
Et là je n’en crois pas mes oreilles :
- … de faire des appels de phare !
Des appels de phare ?
Des appels de phare ! C’est pas vrai ? Mon iconoclaste préférée lui a fait des appels de phare ?
Il y a des jours comme ça où je me traiterais volontiers de nouille : on croit avoir épousé un ange de douceur et en fait on passe toutes ses nuits au lit avec un cow-boy en jupons !
P.S. Mais bon, relativisons ! Eussé-je été plus heureux dans la situation de Gary Shandling : « Quand je n’ai pas de petite copine, je me rase une jambe comme ça j’ai l’impression d’être avec une femme » ? Je ne le crois pas.
Pondu à l'Atelier d'écriture de Villejean le 12 septembre 2017 à partir de la consigne ci-dessous.
Le cimetière marin de Saint-Michel-en-Grève (Côtes d'Armor) le 31 décembre 2016 (1)
Au retour de Locquirec, un arrêt à Saint-Michel-en-Grève pour pouvoir fredonner :" ... mon cimetière soit plus marin que le sien"
(Sans Georges Brassens, qui se souviendrait encore de Paul Valéry ?)
Le cimetière marin de Saint-Michel-en-Grève (Côtes d'Armor) le 31 décembre 2016 (2)
Faut-il mettre une majuscule à "art funéraire" ?
L'Art s'oppose-t-il à la nature ?
Faut-il mettre une majuscule à l'Homme ?
Qu'est-ce que ça doit être bon de vivre sans se poser de questions !
Le cimetière marin de Saint-Michel-en-Grève (Côtes d'Armor) le 31 décembre 2016 (4)
"Dieu que la vie est cruelle
Au musicien des ruelles"
Et la mort douloureuse à ceux
Qui n'entendent plus ses chansons