11 novembre 2020

A.E. VILLEJEAN. - JOUE-LA COMME DELERM !

Livre JK Joue la comme Delerm !

4ème de couverture

Joue-la comme Delerm ! Mais qui est donc cet A.E. Villejean qui envoie en mode Beckham le ballon un peu loin dans le camp de Philippe Delerm ?

S’agit-il d’un livre-hommage ou d’un pastiche hilarant de l’auteur de « La première gorgée de bière » ?

A.E. Villejean utilise la recette de fabrication ainsi résumée : « Chaque texte ne contient pas plus de quarante lignes. L'auteur écrit au présent et use et abuse du pronom « on » et de phrases courtes pour raconter des événements de la vie quotidienne. ».

Mais le résultat ici nous emmène peut-être plus loin que dans le cocon plus ou moins sociologico-moraliste du natif d’Auvers-sur-Oise.

C’en est au point qu’on se demande même s’il ne se sont pas mis à plusieurs pour parler de mignardises, de Carlos Ghosn à l’EHPAD, de baignade à Poulennou, de Maria Candido et son "Je te le le", de «Fais pas ci fais pas ça", de banquiers généreux, de téléphones portables qui sonnent aux enterrements, de campings à pittbulls, de panneaux publicitaires, d’harmonicas, de François Fillon, d’Adam et Eve, bref de "pop culture" d'avant Covid ! On s’arrête là car on est en train de dévoiler la table des matières de l'ouvrage sans penser qu’il y a des gens qui ne lisent que ça dans un livre !

Peut-être sont-ils onze derrière ce pseudonyme, comme une équipe de foot (foutes ?) dans un atelier d’écriture ?

En tout cas, «Joue-là comme Delerm !», vous allez forcément aimer ! Sous peine, sinon, de «passer pour un vieux con» !

***

Début du livre

Zut ! On a encore oublié Madame Delerm !

AEV 2021-07 Jean-Paul - Xenakis

Et pourtant, comme le chante si bien Nino Ferrer dans « Les Cornichons »

«On n'avait rien oublié, c'est maman qui a tout fait
Elle avait travaillé trois jours sans s'arrêter
Pour préparer les paniers, les bouteilles, les paquets
Et la radio».

Chez les Delerm on connaît plus maintenant le fils chanteur, Vincent, que le père écrivain, Philippe. «Le Monologue shakespearien» joué au piano classique par Droopy junior a pris le pas sur «La Première gorgée de bière» désormais bien éventée qu’on ne peut plus boire au bistrot. Ils sont fermés.

C’est comme ça, Depuis un certain Oedipe, les fils tuent leur père… et oublient leur mère. On préfère désormais le « name dropping » chansonnier aux textes courts écrits au présent de l’indicatif. Dans ceux-ci le pronom «on» retrouve sa place de fédération des différences. L’instituteur gomme toutes les individualités. On est tous d’excellents Français. On va gagner. On les aura. On l’aura. On met son masque pour sortir. On signe son Ausweis. On respecte le couvre-feu. Pas de surbrillance. Aucune phrase au-delà d’un kilomètre. On déclare Marcel Proust hors-la-loi.

Mais dans l’histoire, comme le disait jadis Françoise Xénakis, « Zut ! On a encore oublié Madame Delerm ! ». Martine pour les intimes.

On subodore que pour exister entre ses deux artistes et entre deux pique-niques normands à cornichons, Martine est peut-être allée « à la plage ». On prétend qu’elle se cache sous le pseudonyme d’A.E. Villejean pour publier en douce des pastiches des rédactions de CM2 que sont toujours les récits de son homme.

A moins qu’il ne s’agisse de Laure Manaudou ? En ces temps où tout le monde avance masqué, on ne reconnaît plus personne ! On n’est plus sûr de rien !

Tu disais quoi, Martine ?


Pondu pour l'Atelier d'écriture de Villejean en ligne

du mardi 10 novembre 2020

d'après la consigne ci-dessous

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15 mai 2019

JE VAIS PASSER POUR UN VIEUX CON

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 - Je vais passer pour un vieux con mais je n’ai vraiment pas envie d’y aller dans votre EHPAD !

On croit rêver. Il ne s’est pas rasé ce matin, il traîne encore dans son vieux survêtement informe. Pourtant on vient de lui livrer son repas, commandé chez un traiteur très sélect. Il ne sort plus de chez lui à cause du bracelet électronique et il s’est accommodé fort bien avec le temps de ce studio sans confort. On n’y voit ni télé, ni ordinateur, ni téléphone, ni livres ni rien.

Son statut lui interdit toute communication avec l’extérieur. Ca fait des années qu’il crèche là, tout seul, et, pour un peu, on l’aurait presque oublié. Mais l’année dernière un gouvernement gauchisto-écologique a été porté au pouvoir. Une loi a été votée pour que les prisonniers âgés puissent bénéficier d’un placement-déplacement en établissement hospitalier pour personnes âgées dépendantes. Mais lui ne veut pas.

- Enfin, Monsieur Ghosn, lui explique-t-on, ce sera un peu comme si vous recouvriez la liberté !

- Pas dans ces conditions-là. Si c’est pour devoir se farcir des après-midi karaoké et des visites de chorales approximatives ou d’accordéonistes….

- Vous n’aimez pas l’accordéon ?

- Pas quand l’accordéoniste chante faux !
 

Pondu à l'Atelier d'écriture de Villejean le 14 mai 2019
d'après la consigne ci-dessous

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ET CE SOIR ?

Et ce soir, il leur arrive quoi aux Bouley et aux Lepic ?

On n’a pas la télé mais on a des collègues de bureau avec qui on finit par aller prendre une pause. Ils vous parlent parfois de ce qu’ils ont vu la veille sur leur téléviseur. C’est comme ça qu’on fait connaissance avec les deux familles de « Fais pas ci, fais pas ça », les psychorigides de droite, les Lepicovsky ou Lepic, et la famille recomposée bobo de gauche, les Bouley.

On a commencé à regarder ça sur l’ordinateur au milieu de la saison 6. On a tenu jusqu’à la neuvière et dernière saison de cette « Famille Duraton » revisitée.

Après, de la même façon que certains vous disent « Je vais relire Proust » on trouve des saisons anciennes chez les soldeurs ou dans les braderies et on achète ainsi la un et la cinq. Il y a aussi les bibliothèques municipales qui prêtent les dévédés de cette série.

Alors un jour on regarde la saison 5 et lui remonterait bien dans le sens inverse : 5, 4, 3, 2, 1. Mais elle a demandé à revoir la 6 puis la 7 et les autres. Alors on a revu la 6 et en ce moment on est sur la 7. A chaque fois elle dit qu’elle ne les avait pas vus, ces épisodes-là.

Comment a-t-elle pu oublier Médusor et Tatiana Lenoir ? Frédérique Bel ne ferait de l’effet qu’aux spectateurs de sexe masculin ?

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Mais lui, sait-il bien encore ce qui se passe dans l’épisode 6 de la saison 7 où les Bouley ont failli divorcer à cause d’un chien perdu et d’un danseur de country ?

Et ce soir ? Il leur arrive quoi aux Bouley et aux Lepic ? 

Pondu à l'Atelier d'écriture de Villejean le 14 mai 2019
d'après la consigne ci-dessous

CONSIGNE D'ÉCRITURE 1819-28 DU 14 MAI 2019 A L'ATELIER DE VILLEJEAN A RENNES

Ecrire comme Philippe Delerm dans "Je vais passer pour un vieux con"

 

Chaque texte de cet auteur ne contient pas plus de quarante lignes. Il écrit au présent et use et abuse du pronom « on » et de phrases courtes pour raconter des événements de la vie quotidienne. Dans ce style-là vous écrirez de deux à cinq petits textes dont le titre sera choisi dans cette liste : 

Je vais passer pour un vieux con - Vous n’avez aucun message - La maison n’accepte plus les chèques - C’est moi ! - Tout d’abord, bonjour ! - J’ai habité trois ans rue Commines ! - Et puis je vais vous faire une confidence - Comment il l’a cassé ! - Quand on est dedans elle est bonne - Les mots sont dérisoires - J’en parle dans le livre - Nous vous invitons à vous rapprocher - C’est du triplex ! - C’est presque de mauvais goût - J’étais pas né - Alleeez - Je garde mon maître - C’est à voir - J’ai fait cinq ans de piano - Joli chapeau madame - Sinon moi je peux vous emmener - On ne vous voit pas assez souvent - Et là, c’en était pas une ? - Je préfère Le Havre à Rouen - C’est peut-être mieux comme ça - C’est très bien fait - Oh lui, rien ne l’inquiète - Ca passe trop tard - Il y a longtemps que vous attendez ? - A l’aile bon Dieu ! - Et ce soir ? - Attention l’assiette est très chaude - Ils l’avaient dit - Je vais relire Proust - Mets ta cagoule - On n’est pas obligé de tout boire ! - Vous n’aimez pas l’accordéon ? - Je vais chez Mentec - C’est vraiment par gourmandise - Il n’y a que moi qui passe chez moi ! - On va laisser descendre les gens - Je ne m’en servirai plus maintenant.

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02 avril 2018

ABRUTI, VA !

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Abruti, va !

On n’ira pas jusqu’à prononcer les mots vu qu’on est tout seul dans la rue mais on s’arrête devant l’affiche publicitaire. Mieux ! On fait demi-tour et on revient la prendre en photo.

Pourquoi se sent-on blessé, lésé, trahi par cette image-là ?

Elle représente un cow-boy bien connu. Il est représenté assis de profil à la table d’un restaurant.

Enfin, quand on’écrit « restaurant » on abuse peut-être ou alors on est généreux.

Le personnage a terminé son repas et il mâchonne un brin d’herbe devant les restes.

Pendant ce temps, sur le mur, son ombre est encore en train de croquer dans ce qu’on appelle, si on est poli, un « sandwich à la viande dont le concept a été importé des Etats-Unis".

Oui, vous avez deviné. Ce type qui mange plus vite que son ombre, c’est Lucky Luke et c’est une publicité pour McDonalds.

Eh ! Vous aviez besoin d’argent frais, les héritiers de Morris et Goscinny ? Combien avez-vous touché pour permettre ce détournement, salir notre imagerie, flétrir notre imaginaire en insinuant que le héros de notre enfance est capable de vénalité ?

Allez ! Tais-toi, Joe Krapov ! Tu vas écrire des bêtises si tu continues !

Pondu à l'Atelier d'écriture de Villejean le mardi 27 mars 2018 
d'après la consigne ci-dessous

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J’TE JOUE DE L’HARMONICA

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J’te joue d’l’harmonica où tu veux, quand tu veux !

Il n’y a pas plus vintage, comme instrument ! Plus personne n’en joue aujourd’hui. Les vieux fourneaux de votre connaissance vous déclareront avec la fierté de ceux qui peuvent encore citer Aznavour :

- On a connu Albert Raisner qui en jouait dans l’émission « Age tendre et tête de bois » ! Et je vous parle d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître !

- Plus tard on a eu droit aux chemises à fleurs et aux élucubrations d’Antoine, le chanteur opticien. Lui ne savait jouer que deux notes sur cet instrument à bouche que les Québécois appellent « ruine-babines ». Après quoi il lançait « Oh yeah ! » et, précurseur en matière de « name dropping », il parlait d’Yvette Horner et de Johnny Hallyday qu’il souhaitait voir enfermé en cage à Médrano. Quel cirque c’était, ces années 60 !

Pour mon collègue René, l’harmonica c’est Bob Dylan.
Pour moi c’est plutôt Neil Young.
Pour d’autres c’est Jean-Jacques Milteau.

Non, plus personne n’en joue. Je suis le dernier à souffler-aspirer dedans par-dessus mon ukulélé. J’te joue d’l’harmonica où tu veux, quand tu veux ! C’est plus facile à transporter qu’une contrebasse !

De la guimbarde ? Non. Je n’ai jamais appris comment ça marchait.
De l’Anna Karina ? Non plus. Jean-Luc Godard interdisait que l’on soufflât dedans. Je crois d’ailleurs qu’on dit « ocarina » plutôt qu’"Anna Karina".


Pondu à l'Atelier d'écriture de Villejean le mardi 27 mars 2018 
d'après la consigne ci-dessous

ADAM ET EVE

1718-22 Adam et Eve de Rubens

ADAM – C’est pas pour dire mais je préfère Gand à Bruges. Mais bon… j’dis ça, j’dis rien !

EVE – Alors ferme la ! Tais-toi, oui ! Tais-toi, tu vas dire des bêtises. A croire que tu ne sais faire que ça !

ADAM – Pour être tout à fait honnête avec vous, on était bien sous la couette, tout à l’heure ! Je pense que vous êtes un type dans mon genre. Avec quelques petites différences, bien sûr !

EVE – Abruti, va ! C’est juste insupportable ! Vos bêtises, il faudrait les noter !

ADAM – On peut peut-être se tutoyer ? Vu qu’on va passer pas mal de temps ensemble ?

EVE – Ah non, mon pote ! Compte là-dessus et bois de l’eau ! L’amour popote, ce n’est pas pour moi. Tu vas faire ceinture !

ADAM – En même temps je peux comprendre. Vous n’êtes effectivement pas du genre à prodiguer des conseils affectueux comme « Ne rentre pas trop tard ! » « Ne prends pas froid ! » ou à vous inquiéter : « Où sont les enfants ? ». Là on est davantage sur « Je suis une intello rebelle et toi tu n’as pas lu « Au-dessous du volcan » ! ».

EVE – Vous me flattez, Adam ! Un jour peut-être vous jouerez là, vous aussi, dans la cour des grands. Mais pour l’instant vous avez l’air du type qui a été renvoyé de partout !

ADAM – J’y peux rien ! C’est le dirlo ! Il n‘a pas fait son deuil d’une planète harmonieuse où les hommes et les femmes vivraient, croisseraient ou coasseraient et multiplieraient…

EVE – Vous devriez lire le Bescherelle ! Moi je le lis chez ma coiffeuse, ça aide pour faire des phrases qui tiennent debout. Nous allons vous laisser, mon vieux ! Le monde est vaste, vous trouverez peut-être une compagne à votre mesure ici ou là !

(Elle s’en va).

ADAM – Je sais pas ce qu’on leur a fait aux jeunes mais ils n’articulent plus, maintenant ! Eh oui, mon brave Milou, je me suis pris le premier râteau de l’humanité, aujourd’hui !

LE SERPENT – Je vous prie de cesser de m’appeler Milou. Je suis un serpent, pas un chien ! N’oubliez pas que cette île fait neuf kilomètres carrés et que vous êtes seul.e.s dessus. Elle reviendra vers vous, ne vous inquiétez pas !

ADAM – Oh, je ne m’inquiète pas de cette fille nommée Eve ! C’est juste le dirlo qui me rappelle quelqu’un mais je ne sais plus qui. Un acteur de cinéma ? Un mec à la télé ? On l’a vu dans quoi déjà ?


Pondu à l'Atelier d'écriture de Villejean le mardi 27 mars 2018
d'après la liste de phrases de la consigne ci-dessous

CONSIGNE D'ÉCRITURE 1718-23 DU 27 MARS 2018 A L'ATELIER DE VILLEJEAN A RENNES

Ecrire comme Philippe Delerm


Philippe Delerm ! L'auteur de "La première gorgée de bière" a publié récemment "Et vous avez eu beau temps ?"

Il applique la même recette dans ce recueil : chaque texte ne contient pas plus de quarante lignes. L'auteur écrit au présent et use et abuse du pronom « on » et de phrases courtes pour raconter des événements de la vie quotidienne. Dans ce style-là vous écrirez deux ou trois petits textes dont le titre sera choisi dans cette liste :

Et vous avez eu beau temps ? - Renvoyé de partout - Je le lis chez ma coiffeuse - N’oubliez pas… - Je me suis permis - Et tu n’as rien senti venir ? - Il faudrait les noter - Il n’a pas fait son deuil - Un jour peut-être vous jouerez là, vous aussi - Tais-toi, tu vas dire des bêtises - C’est pas pour nous - Et prends-toi quelque chose - Là on est davantage sur… - J’te joue d’l’harmonica - En même temps je peux comprendre - Vous êtes un type dans mon genre - C’est grâce au collectif - Abruti, va ! - Chez nous c’est trois - Tiens, rends-toi utile - Nous allons vous laisser - On l’a déjà vu dans quoi, déjà ? - C’est juste insupportable - Où sont les enfants ? - Il aimait ça le Monopoly - Je sais pas ce qu’on leur a fait aux jeunes - On était bien sous la couette - On peut peut-être se tutoyer ? - Ca finit quand ? - Je préfère Gand à Bruges - Ca pousse et ça nous pousse - Ils n’articulent plus maintenant - C’est pas pour dire mais - J’dis ça, j’dis rien - Pour être tout à fait honnête avec vous. - Oui, mon brave Milou - Ne rentre pas trop tard, ne prends pas froid ! - Vous me flattez - Tu n’as pas lu "Au-dessous du volcan" ?

1718-22 Et-vous-avez-eu-beau-temps-1-1

 

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05 décembre 2016

N'OUBLIEZ PAS D'ETEINDRE VOS PORTABLES !

N’oubliez pas d’éteindre votre portable… et votre radio ! Depuis dimanche soir le monde s’est arrêté sur le score quasi soviétique obtenu par le camarade François Fillon à la primaire de la droite.

On n’avance plus. On recule, même. On se trouve rejeté vingt ans en arrière, dans une France que ses concurrents et adversaires, très sympathiques, ont qualifiée de « moisie ».

D85 décembre - 05

Ils n’ont peut-être pas tort. C’est qu’on le connait bien, ce coin du Sud de la Sarthe où il a entamé sa carrière politique. On revoit encore avec la même sérénité qu’alors cette abbaye de Solesmes, austère et fière et bien dressée. On a trace, dans son grenier, des douze années passées ici, sous forme de centaines de photographies colorées ou en noir et blanc de l’endroit, prises depuis la petite place de l’autre côté de la rivière. Des barques, des pénichettes y sont amarrées. On en a même fait des aquarelles.

La Sarthe ! C’est un pays de soutanes surannées, de résignations paysannes, de respect ancestral de l’autorité, des nobliaux puis des institutions. Quelle fierté, évidemment très brassensienne, liée à la Ballade des gens qui sont nés quelque part, quand un enfant du pays atteint les sommets de la réussite à laquelle nul ici n’a jamais rêvé ! On est trop bien dans ce jardin extraordinaire où chaque 24 heures compte plus qu’ailleurs, dans cette ville la plus sportive de France, capitale de la modération à l’abri de tout aléa. Monsieur le Maire a toujours trouvé du travail à tout le monde à la fromagerie Bel ou chez LDC où l’on découpe le poulet. Loué soit-il pour cela !

D 93 01 Solesmes 25 ou 43Oui, un recul de vingt ans en arrière ! On se souvient que le mercredi soir et le samedi après-midi on allait jouer aux échecs. On poussait du bois avec le docteur G. médecin-accoucheur de toute la ville. C’était une terre de droite dans laquelle vous et une poignée de détestables fonctionnaires étiez les seuls à voter pour la gauche. Et pourtant, effet de la douceur angevine pas très lointaine, sans doute, elles vous indifféraient un tant soit peu, ces moeurs provinciales poussiéreuses qui n’étaient pas les vôtres : les enfants dans le privé, le golf de Sablé-Solesmes, le club d’équitation, les sonneries de trompe de chasse au château de Dobert, le Festival de musique baroque, le vol en montgolfière pratiqué comme étant le nec plus ultra du snobisme local.

Et voilà qu’après vingt ans d’interruption on remet les pieds dans une aimable assemblée de papys joueurs d’échecs. Et comme par un fait exprès le monde journalistique s’extasie encore et toujours comme à l’époque sur le roi François par-ci, le roi François par-là !

N’oublie pas d’éteindre ton portable et surtout ta radio, Joe Krapov ! Le monde avance à rebrousse-temps ! Ca va te prendre à rebrousse-poil !


Pondu à l'Atelier d'écriture de Villejean le 29 novembre 2016 d'après la consigne ci-dessous.
 

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VOUS VOULIEZ LUI PARLER ?

Vous vouliez lui parler ? Essayez donc de l’alpaguer, d’en placer une, il est là.

Il vient chez vous avec sa trottinette, sa barbichette, sa voix tonitruante, son bagout infernal, son chapeau sur la tête. Pas étonnant qu’il ne vous laisse pas finir vos phrases un poil alambiquées : il est quasi-sourd d’une oreille.

Il s’appelle Emmanuel mais pour tout le monde c’est Manu. C’est peut-être bien même celui à qui les Inconnus, dans leur sketch mémorable, demandaient « Hey, Manu ! Tu descends ? » et qui répondait « Pour quoi faire ? ». Bien sûr il a vingt ou trente ans de plus. Né en 1958 il vient de fêter ses 58 ans cette année.

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Je l’adore ! Manu c’est mon cadeau de départ en retraite ! C’est le chanteur des B Car puis d’Am’nez Zique et les Biches, mes comparses musicaux du moment. Il a la même curiosité infantile que moi pour le cinéma, la lecture, les chansons drôles. Il a lui aussi Télérama qui trône dans ses toilettes-salon de lecture. On jouit d’envoyer « Monsieur William » sur la treizième avenue de New-York. Ou de rappeler les « Au suivant » terribles de Jacques Brel. Ou lorsque l’on situe avec Dick Annegarn l’action du « Père Ubu » en Belgique plutôt qu’en Pologne. On a en projet d’aller chanter en duo « Ah ! Mademoiselle Rose » et « Le petit vin blanc » sous les tonnelles des maisons de retraite de Rennes. Manu ! Une tchatche et un abattage terribles ! Mais avant il faudra qu’on parle !

Parce que… vous vouliez lui parler !

- Manu, je veux bien venir jouer à ton anniversaire mais tu ne m’as toujours pas donné l’adresse de la salle à Saint-Aubin d’Aubigné !
- Manu, le concert à Paris, c’est où exactement ? A Villecresnes ? Ah, faudra louer un véhicule ?
- Manu ? T’as un GPS pour aller à Forges-la-Forêt ? Une carte routière ? Non ? Ah oui, t’as du bol, c’est bien là, à gauche, d’après le panneau !

Sur les enregistrements des répétitions du groupe, je les laisse parler, Manu, Seb et les Biches. Tous en même temps ! A la vitesse d’une mitraillette. On ne comprend rien à ce qui s’échange !

Et puis, un beau dimanche d’automne, on constate un miracle ! Ce lapin Duracell, ce ludion permanent, ce culbuto qui oublie un peu partout ses partitions et ses courses du marché des Lices… On l’a invité à jouer une partie d’échecs. Et là, devant l’échiquier, phénomène incroyable, il se tait pendant deux heures !

Et en plus il joue bien, ce fou !

 Pondu à l'Atelier d'écriture de Villejean le 29 novembre 2016 d'après la consigne ci-dessous.