CONSIGNE D'ÉCRITURE 2324-10 DU 28 NOVEMBRE 2023 A L'ATELIER DE VILLEJEAN
Soixante-quatre cases
Cette ville nouvelle été construite à l’image de certains quartiers de la ville de New-York. Neuf avenues rectilignes s’y croisent à angle droit, délimitant ainsi soixante quatre blocs d’habitation ayant la forme d’un carré parfait.
Utilisez les noms des quartiers et des personnages qui suivent pour raconter une tranche de vie à l’intérieur de cette ville.
La partie française - La partie anglaise - La rue du Fianchetto - Le Boulevard Traxler - Le quartier letton - La Tour blanche – La Découverte - La rue de Steenwijk - Restaurant de la Fourchette royale – Café de la Régence - Le square Tartacover - La statue du grand Turc automate - Le Pré catalan - L’Avenue de la Volga - La place de Budapest - Le Grand roc - L’Immeuble Gambit-Roi - La Casa Rossolimo - L’Orang-outan, café associatif – La piscine de l’Hippopotame – La M.J.C. Diagonale.
La Sicilienne - La Scandinave - La Hollandaise - Monsieur Nimzovitch - Madame Philidor - Monsieur Larsen - Monsieur Tarrasch - Madame Staunton - Monsieur Bird - L’évêque noir - Le cavalier Pieuvre - Emilie Paulsen - Sabine Maroczy - Miguel Najdorf - Robert Fischer - Gaby Marshall - Caro(line) Kann – Sophie Alekhine - Mlle Frauke Grünfeld - Olga Tchigorine - Marc Taïmanov, pion empoisonnant - Le docteur Hérisson.
Vous pouvez nous parler par exemple de Coralie qui se prépare à passer son bachot et est amoureuse d’un homme marié, de Mitsumasa, peintre japonais de passage, de Laure Manaudou venue disputer une compétition à la piscine Bogolioubov, du café « Le Diapason » où l’on joue aux échecs au son des concerts de rock ou de tout ce que vous voudrez bien imaginer dans ce cadre.
Illustration de Jonathan Wolstenholme
L'Arbre aux quarante écus à Rennes le 25 novembre 2023
Quitte Paris, etc. / La Bamboche
J'ai passé pas mal de temps dans mon existence à farfouiller chez les disquaires, dans les braderies, chez les soldeurs et je dispose donc d'une discothèque pleine de rondelles de vinyle, surtout des 33 tours dans tous les genres sauf le jazz ! A vrai dire, pendant un long temps de ma vie, c'est là que j'ai dilapidé la maigre fortune qui était la mienne.
Je suis en train de faire du tri et de numériser cela en MP3. J'ai attaqué cette semaine la rangée de ceux que j'ai entreposés dans le grenier. J'ai trouvé là quatre albums du groupe folk La Bamboche, achetés sans doute en braderie à Rennes mais assez peu écoutés. A tort pour deux raisons.
1) Sur celui qui est illustré "façon Pieds nickelés" "Quitte Paris" il y a deux chansons magnifiquement interprétées, qui ne relèvent pas précisément du "folk" ou du folklore mais sont des chansons du début du XXe siècle, "Quitte Paris" et la cèlèbre "Chanson de Craonne"
La chanson de Craonne est à 23'40.
On entend aussi dans ce disque, à 34'20, "Ami buvons", une chanson à boire qui me dit quelque chose mais je n'ai pas retrouvé la partition dans ce que j'ai scanné de mes chorales saboliennes ni dans mon classeur d'Héloïse.
2) C'est quand même assez fou, depuis "Su'l pont du Nord (de Nantes ou d'ailleurs) un bal y est donné" comme la chanson populaire adore se consacrer aux faits divers tragiques, larmoyants, aux histoires d'amour qui finissent mal en général. Cela donne des envies de parodie ou d'humour noir assez terribles !
C'est le cas avec celle-ci, tirée d'un autre album de la Bamboche,"La Saison des amours". Elle est une composition de Jean Blanchard. Elle s'appelle "La Fille d'usine" et je suggère de remplacer le dernier vers "Vous pouvez vous présenter, garçons et filles sont embauchés" par "V'nez d'la part d'Emmanuel, y'a qu'la rue à traverser" ! ;-)
TOUTE UNE PHILOSOPHIE
Il vaut mieux rester sur son quant-à-soi que d’empiéter ne serait-ce qu’un peu sur le Nietzsche des autres. C’est là un impératif catégorique enseigné dans l’Emmanuel de philosophie.
Car un plat tonique n’est pas forcément toujours aphrodisiaque. Les scène de ménage d’Hegel et de Spinoza, il ne faut pas s’en mêler : on ne sait pas qui a raison dans l’histoire ni qui nettoiera le vomi.
J’ai longtemps fait partie de l’école péripatéticienne. C’est incroyable, en faisant marcher ses jambes, comme on suppute.
Au poker, par exemple, toute possibilité de gain dépends des cartes qu’on donne à René, à Blaise et à Pascal. C’est d’ailleurs à un palefrenier qu’on doit la formule « je panse donc j’essuie ».
Il ferait beau voir, comme disait Sartre à Simone, qu’en restant dans son huis clos on attrape les mains sales si on pense à toujours garder son quant-à-soi et sa tapette à mouches.
Et pourtant, dès que l’homme a commencé à se vêtir de peaux de bêtes il a bien fallu les chasser, les mites, de la caverne.
Plus tard, bien Plutarque, naît l’architecture. Madame à sa tour monte et Monsieur de Montaigne aussi. Qu’est-ce qu’Onfray sans les Michel ?
Michel Delpech, Michel Legrand, Michel Polnareff, Michel Berger, Mick Jagger et à l’inverse Mick Micheyl, sans oublier Michel Drücker qui a toujours fait bonne impression. J’ajouterai volontiers Michèle Torr, Michelle ma belle, Michèle Mercier, toutes les Michelle que j’aime et même la mère Michel sans laquelle le chat de Schroedinger, l’eusses-tu cru, ne serait rien dans l’histoire.
Oui, il faut garder son quant-à-soi. Songez à toutes ces oies blanches parties se perdre sur des chemins de traverse : elles que des vols sots déroutèrent auraient du relire Voltaire et Rousseau.
« Zadig Zadig en revenant de Nantes » et « Adieu l’Emile je t’aimais bien tu sais », on ne sort pas de là ! Ce sont les labourages et pâturages de la France et de la Suisse, les mamelles de Tirésias ou les onze mille verges de la vie en République.
Mais d’un coup je m’égare en poésie, c’est un travers dont je ne me Kierkegarde jamais assez. Peut-être Apollinaire était-il socratique ? Car là où Socrate erre il y a des Lunatiques, le Sénèque plus ultra des Sélénites, en dessous tu tires l’échelle, tout Fichte Lacan, il y a Elon Musk dans sa fusée, les petits hommes verts de la planète Marx qui t’engueulent sacrément... épicurien !
Dans le grand cocktail des métaphores et des années qui filent, comme on dit chez les bombyx, il vaut mieux garder son verre à soi que de faire de la peinture sur les autres.
Car c’est bien connu : tout ce qu’on file aux Sophie, l’existence nous le rend sous forme de dents de sagesse dont l’extraction est douloureuse. Tout comme l’est celle du lit après une nuit d’insomnie durant laquelle on a écrit, allongé, son Défi du samedi. Pour se relire après, c’est comme pour être à la mode, ce n’est point commode. Pour Humer le vent du succès il vaut mieux être assis aux première Lodge. Mais bon, vous savez ce que c’est, l’inspiration, elle vient quand elle veut, c’est une vraie tête de Bachelard, celle-là !
Ecrit pour le Défi du samedi n° 795 à partir de cette consigne : Quant-à-soi.
Le Parc du Thabor à la nuit à Rennes le 23 novembre 2023
LE JOUR SUIVANT
Le jour suivant Mitsumasa fut très déçu par le Grand Canal : il était tout petit ! Au pied de l'église Santa Maria della Salute il n'y avait que cinq gondoles. C'est tout juste si les gondoliers présents ne se battaient pas entre eux pour proposer une balade en amoureux au seul couple de touristes qui déambulait à proximité de l’embarcadère sur la piazzetta.
C'est vrai qu’au prix de la course vers le Pont des Soupirs ou le Rialto il ne fallait pas aller chercher plus loin les vrais pigeons de Venise.
Mitsumasa alla s'enregistrer à la Pensione Wildner où il hérita de la chambre n°28. Ce numéro était également celui du jour où il était né. Après avoir confié son cheval à un palefrenier très bronzé il revint à pied prendre la température du lieu.
Tout était pittoresque en diable ! Devant l'église fermée deux paysannes locales, un fichu sur la tête, semblaient se prendre en photo avec une perche à selfie. C'était d'autant plus incongru qu’un peu plus loin à droite un photographe de rue proposait ses services à un officier de marine accompagné d'une hôtesse de l'air. Son appareil ancestral, semblable à ceux dessinés par Albert Dubout dans son recueil « Les Photographes » était posé sur un trépied et devait encore fonctionner avec des plaques rigides.
- Soit quelque chose cloche par ici, soit il y a des problèmes dans la temporalité de cet univers ou de l'Italie tout entière ! » songea Mitsumasa.
De fait, à droite du photographe, un médecin en robe et portant un chapeau moyen-âgeux avait posé sur des tréteaux roulants trois gobelets renversés.
Proposait-t-il une partie de bonneteau ? Ou bien, comme il brandissait un flacon, commercialisait-il en Europe le fameux élixir du docteur Doxey fabriqué en Amérique avec des ingrédients qui devaient rester aussi secrets que la lettre de Coralie ?
Mitsumasa avait eu droit, sans en comprendre un traître mot, à toute l'histoire que Giacomo avait contée à voix forte au gendarme de Saint-Tropez en képi et ceinture blanche et qu’avait écoutée également dame Véronica en jupe rouge et pull vert.
- Je l'ai retrouvée dans mon grenier cette lettre écrite par une certaine Coralie il y a quelques vingt ans ! D'après son contenu il paraît que j'étais chargé de la remettre alors à mon ami Giambattista. C'est une jeune fille de 19 ans qui était tombée amoureuse de lui bien qu’il fût marié depuis peu et qui lui disait son souhait de le revoir pour l'embrasser !
- Et plus si affinités, sans doute ? demanda Veronica.
- On ne saura jamais ! Si j'ai retrouvé la lettre vingt ans après c'est que je ne l'ai pas remise !
- Mais tu es un vrai père La Morale, Giacomo Crapovio ! commenta le gendarme. Je n'aurais jamais cru cela de toi !
- Un père La Morale ? Tu parles ! Un vrai tue-l’amour, oui ! commenta Véronica.
A proximité, deux touristes français, un homme et une femme, s'étaient assis sur les marches de l'église avec leurs lourdes valises posées à même le sol. Sans doute repartaient-ils vers la gare. Ernest avait encore sur l'arcade sourcilière le sparadrap dont Margaret l'avait artistiquement décoré après la bagarre de la veille au Harry’s bar.
- Eh bien ! On s'en souviendra de notre voyage de noces à Venise ! rigolait-elle.
- Je savais que l'Italie avait la réputation d'être un peu tape-à-l'oeil mais je ne m'attendais pas à ce que ce soit aussi frappant ! admit Ernest.
Un peu plus loin sur les marches trois ragazzi della cita, des ados en goguette, des zazous en sweat à capuche zonaient en zyeutant le groupe de touristes attroupé autour de Zampano qui chantait des tarentelles accompagné de Gelsomina à l'accordéon. Il y avait peut-être des poches à se faire, mieux remplies que celle qu’Ernest avait sous les yeux.
Comme on approchait de midi Mitsumasa alla s'installer en terrasse du restaurant proche. Il ne déjeuna pas vraiment tranquillement : il fut importuné alors qu'il dégustait son plat de spaghetti par une mendiante qui portait son bébé dans un sac ventral puis par une gamine qui tenait à tout prix à ce qu'il lui achetât un bouquet de fleurs pour sa « donna ».
Il avait trop peu encore de vocabulaire italien pour pouvoir expliquer à la fillette qu’il avait divorcé récemment et qu'il était revenu en Italie afin de retrouver une nommé Coralie qu'il avait connue par ici une vingtaine d'années auparavant.
Pondu à l'Atelier d'écriture de Villejean le mardi 21 novembre 2023
d'après la consigne 2324-09 ci-dessous
CONSIGNE D'ÉCRITURE 2324-09 DU 21 NOVEMBRE 2023 A L'ATELIER DE VILLEJEAN
Le Jour suivant
C'est le titre d'un livre, ou plutôt d'un album d'illustrations muet, du graphiste japonais Mitsumasa Anno, paru à L'École des loisirs en 1979.
On y voit les étapes du périple que le dessinateur a accompli en Europe en 1963, 1975 et 1978. Les lieux représentés sont un mélange de médiéval et de contemporain assez surprenant.
Vous allez choisir une des images de l'album. L'incipit de votre texte sera obligatoirement "Le jour suivant, Mitsumasa..."
Vous devrez obligatoirement inclure dans votre texte les cinq mots qui figurent sous l'image choisie. Vous essaierez de décrire un maximum d'éléments de détail de cette image.