02 décembre 2018

A PART PEUT-ÊTRE… AU MUSÉE DES HORREURS ?

Lakévio 132 121942861

Le regard a quelque chose de dur, déjà. Elle fera de la route, cette môme ! Elle est du genre à régenter son entourage, à tout réformer, à œuvrer en douceur et cependant en y mettant toute la fermeté voulue.

On ne la détournera pas comme cela de son but. Elle a du caractère, elle est tenace, peut même se montrer résolument féroce quand elle va au charbon.

Le trône sur lequel elle a posé ses fesses semble trop grand pour elle certes ou alors prévu pour une autre. Attendez quelques années et vous verrez que ça ne va pas durer : elle prendra de l’ampleur et comprendra que la royauté, ce n’est que du folklore, juste une couronne ou des chapeaux sur la tête et du tralala pour la presse people. Le monde se gouverne par l’argent, les réseaux et le carnet d’adresses.

Côté bagatelle ce ne sera pas ça par contre. Sur cette œuvre elle évoque déjà le fameux « Ferme les yeux et pense à l’Angleterre !».

Ce côté brut de décoffrage avec malgré tout un sens de l’honneur, de l’ordre, du haut rang, ce goût pour la sueur et les larmes nous évoque forcément la colonne Nelson et l’autre fumeur à gros ventre abhorrant le sport !

On s’approche du cartouche et on constate qu’on a vu juste. On l’a reconnue, la dame de fer ! Ce tableau représente en effet Margaret Thatcher enfant. Désolé, camarade Renaud ! 

Ecrit pour le jeu de Lakévio n° 132 d'après cette consigne

 

Posté par Joe Krapov à 21:37 - - Commentaires [6] - Permalien [#]
Tags : , ,


DÉTESTER SARAH

Lakévio 132 121942861

- Va me chercher un sceptre en or, Père Ubu ! Et que ça saute !

- T’es qu’une méchante, Sarah ! Tu n’arrêtes pas de jouer au chef et de me donner des ordres !

- Et merdre, Père Ubu ! On est les monarques du royaume de Pologne, alors autant que ça serve à commander, ordonner, plastronner ! A s’en mettre dans les poches, également ! Avec ton épée en plastoc, ta cape de Zorro et ton crochet à phynance, tu peux quand même un peu les taper, les Polaks, non ? Chouraver leurs zlotys, engouffrer leur vodka, créer des taxes comme la gabelle, la CSG etcetera ? C’est ça le rôle d’un tyran ! Faut réellement que je t’apprenne tout ça, espèce de nul ?

- D’abord je ne veux plus jouer à ce jeu-là.

- Hola, mes valets ! Qu’on apporte des poupées, des peluches, des Lego, des Polly pockets et des poneys à ce pleutre ! Et devant Ma Majesté prosternez-vous ! Contemplez mon trône et honorez ma grandeur ! Où tu vas comme ça, père Ubu ?

- Je retourne dans le salon avec nos mères. Tu vas trop au théâtre et tu écoutes trop France-Culture, je trouve !

- Soldats ! Coupez la tête à ce rustre ! Dégonflé ! Lopette ! Tyranneau d’opérette !

***

 

Lakévio 132 Ubu roi

- Et alors, Alfred ? Qu’est-ce que j’apprends ? Tu ne veux donc plus jouer avec Sarah ?

- Non, elle est trop commandeuse. Et je préfère la pyrogravure aux gravures de mode.

Alfred sort son coffret et se met à graver des escargots sur sa planche en contreplaqué.

En aparté, Madame Bernhardt demande à Madame Jarry :


- Quelque chose ne tourne pas rond dans la tête de ce gosse, non ?


Ecrit pour le jeu de Lakévio n° 132 d'après cette consigne

Posté par Joe Krapov à 20:07 - - Commentaires [16] - Permalien [#]
Tags :

19 novembre 2018

GERMAINE QUINGE ED NOM ! *

Lakévio 130 20809163

Voici l'heure où commence l'histoire de Germaine Malorthy, du bourg de Terninques, en Artois : c’est neuf heures du matin. Elle installe ses 90 kilos, clope au bec, au volant de sa vieille Renault 5 et, toussotant autant que le moteur, s’en va cahin-caha vers Arras toute proche.

Elle se gare près de l’hôtel de ville, s’extirpe de la carcasse piquée de rouille et se rend au service de l’état-civil. Elle prend un ticket et son tour dans la queue.

- Qu’est-ce qui vous amène, chère Madame ? demande aimablement l’employé faux-cul en contemplant le laideron dépenaillé qui vient de s’asseoir face à lui.

- Ben v’là ! Je n’n ai marre qu’in m’appelle toudi Germaine ! I’ m sanne que tout l’monde y s’fout d’mi à cause ed cha. Ch’est possibe eud quinger d’nom et d’ prénom ? **

- Mais bien entendu, chère concitoyenne ! Du moment que vous ne souhaitez pas devenir Fañch Le Marrec avec un tilde breton sur le n, Mohamed Merah, Mégane Renault, Ikéa Rogntudju, Rambo Livi ou Nutella Téoula, tout est possible, tout est réalisable. L’identité est à la carte ! Vous avez d’ailleurs peut-être établi votre choix avant de venir formaliser ?

- Oui ! Ej voudros ben qu’in m’appelle Lakévio Ambato ! ***

- Lakévio Ambato ? Très joli choix, Madame ! Un petit côté latin, exotique, méditerranéen ! Je vous félicite, c’est une très bonne idée. Je vous établis les papiers tout de suite. Voulez-vous bien entrer dans la cabine du photomaton pour que j’appose une photo récente sur votre carte ?

Germaine lève sa graisse et s’exécute. Elle entre tant bien que mal dans le photomaton. Quatre coups de flash plus tard, Lakévio Ambato en ressort : svelte, dynamique, élégante, mince, racée, c’est une autre femme. Ses cheveux sont si légers qu’ils sembleraient flotter dans le vent s’il y avait un souffle d’air quelconque dans la mairie d’Arras. Ce prénom de Lakévio lui va très bien au teint.

L’employé lui tend ses papiers. Elle règle le montant du timbre fiscal, sort de l’hôtel de ville sous le regard de loup texaveryen de tous les individus de sexe masculin présents en ce lieu.

Parvenue là où Germaine avait garé sa R5, elle sort ses clés de voiture de son sac et ouvre la portière de la Ferrari GTC4 Lusso blanche. Elle démarre, prend la route de Paris puis celle du Sud. Le trajet se passe sans encombre. Il y a juste, de temps en temps, une petite voix intérieure du moteur qui émet un son comme « Si j’aros su ! Si j’aros su ! » ou « Si j’aros su, j’y seros allé avant !». ****

Lakévio 130 121799831

Tableau de Carrie Graber

En rentrant le soir dans sa villa du Lubéron, Lakévio va piquer une tête dans sa piscine. Puis c’est l’heure de passer à table.

- Nestor, commande-t-elle au majordome. Vous demanderez à Joseph de porter la voiture au garage demain. Elle fait un curieux petit bruit lorsque je fais des pointes de vitesse. Dites-lui aussi que nous prendrons la Rolls pour aller flamber à Monte-Carlo demain soir.

- Bien Mademoiselle !

Lakévio 130 57786500Le repas d’Honorine est excellent comme à l’habitude et pour terminer la soirée Lakévio hésite entre la relecture d’une nouvelle de Francis Scott Fitzgerald dans le recueil « Un diamant gros comme le Ritz » ou la consultation d’un documentaire sur Rome sur le home cinéma. Ou peut-être rien : c’est si bon de revenir chez soi et de s’y sentir bien ! Dehors la nuit noire et le bruit assourdissant des criquets s'étendent de nouveau, maintenant, sur le jardin et la terrasse, tout autour de la maison.

Traduction des phrases en Ch'ti :

* Germaine change de nom

**  Voyez-vous, Monsieur l'employé, je suis lasse de porter ce prénom Germaine. Il me semble que ce patronyme fait naître moult moqueries chez mes contemporain.e.s. Me serait-il possible de changer d'identité ?

*** Effectivement, j'aimerais assez me faire appeler Lakévio Ambato.

**** Si j'avais su, j'y serais allée bien avant !

Les deux photos sont empruntées à Lakévio.

Ecrit pour le jeu de Lakévio n° 130 d'après cette consigne

Posté par Joe Krapov à 10:41 - - Commentaires [18] - Permalien [#]
Tags :

11 novembre 2018

MISS FANFRELUCHE EST DE RETOUR

Lakévio 129

Elle ne va pas le prendre longtemps, le soleil, la poule de luxe en rouge du quatrième, sur son balcon de la place Bellecour, dans cet immeuble où je ne suis que la concierge. Peut-être bien même que d’ici peu elle va se retrouver à l’ombre ! En tout cas, pas la peine qu’elle attende son amant du mercredi, le notaire à cravate de Grenoble. Il ne viendra plus.

Moi aussi j’ai eu mon heure de gloire et tous les regards se tournaient vers moi dans ma jeunesse ; avec mon tralala, mon truc en plumes, ma guêpière et mes longs jupons, en casquette et boutons dorés, j’étais une étoile des Folies-Bergères. Je caracolais comme un cheval sauvage, j’affolais tous les Vénitiens du Lido. On m’avait nommée Miss Fanfreluche à cause de mes tenues de scène affriolantes et de mes cavalcades effrénées.

Et puis, hélas pour moi, j’ai rencontré mon Julot. Il se prétendait étudiant en droit mais c’était surtout à l’époque un dévoyé, un voyou. L’ai-je bien descendu le grand escalier ? Oui, jusqu’au trottoir où il m’a mise avant de disparaître dans la nature, fortune faite grâce à mes charmes.

Moi j’y suis restée sur le trottoir. Je le balaie tous les jours et l’escalier, si je le remonte c’est pour le nettoyer. Mais demain, cette vie-là sera terminée. En rentrant de chez le notaire j’ai mis le feu à tous ces souvenirs d’autrefois que j’avais conservés dans une malle au grenier. Je n’ai conservé qu’un bas résille. Je suis allé le déposer, en son absence, dans le tiroir d’une commode chez la poule de luxe du quatrième. C'est bien pratique parfois d'avoir les clés des appartements de tout l'immeuble !

Je laisserai l’affaire se tasser puis avec le magot que j’ai amassé chez Jules après lui avoir fait payer chèrement son inconduite d’autrefois, je partirai. Personne ne pourra jamais soupçonner la bignole lyonnaise disgracieuse que je suis devenue de porter ou d’avoir porté ces érotiques fanfreluches, ces colifichets de luxe.

Ce sera à nouveau la belle vie. Je pourrai afficher – symboliquement bien sûr – sur ma nouvelle loge virtuelle : la concierge est dans l’escapade !

lakévio 129 dauphiné adapté

Ecrit pour le jeu de Lakévio n° 129 d'après cette consigne.

Notons que ce texte répond aussi à la consigne des Impromptus littéraires du 22 octobre 2018

et pourrait très bien servir aussi au Défi du samedi n° 533 dont la consigne est Fanfreluche !!

Posté par Joe Krapov à 21:20 - - Commentaires [8] - Permalien [#]
Tags :

05 novembre 2018

IL N’Y A PAS D’AMOUR HEUREUX MAIS C’EST NOTRE AMOUR À TOUS DEUX

Lakévio 128 Norman Rockwell 121717782

- Mon grand chêne ! Mon bel amandier !

- Ma petite marguerite ! Mon myosotis ! Mon petit cheval dans le mauvais temps !

- Mon petit joueur de flûteau ! Mon croque-notes !

- Ma brave Margot ! Ma princesse !

- Mon mécréant d’amour ! Mon roi boiteux !

- Ma religieuse au chocolat ! Ma tempête dans un bénitier !

- Mon amoureux des bancs publics !

- Mon Hélène aux sabots crottés ! Ma nymphomane !

- Mon philistin ! Mon épicier ! Mon pornographe !

- Ma Lanturlurette !

- Mon Lanturlu !

- Rien à jeter chez toi, ma Pénélope chérie !

- Je bivouaque au pays de cocagne avec toi, mon Dom Juan fougueux !

- Ma Bécassine aux yeux pervenche !

- Mon Auvergnat ! Mon bricoleur ! Mon Trompe-la-mort !

- Mon revenant ! Mon fantôme !

- Mon vieux fossile ! Mon Moyenâgeux !

- Ma douce ancêtre ! Mon amour d’antan ! Ma grisette !

- Mon sale petit bonhomme ! Mon épave !

- Ma traîtresse ! Mon cauchemar ! Ma maîtresse d’école donneuse de fessée !

- Mon cocu préféré !

- Ma corne d’aurochs ! Ma dame du temps jadis en balade !

- Mon rat de cave ! Mon fossoyeur !

- Je sais, je sais, je suis un voyou mais… que je t’aime, que je t’aime, que je t’aime, Gabrielle, quand tu brosses mon épaule !

- M’enfin ?! Edmond ! Tu confonds !

- Quoi ? Ce n’est pas de Brassens, ça ?

- Ce n’est pas ça ! C’est que je ne m’appelle pas Gabrielle ou Charlotte ou Sarah ! Je suis Anna !

- C’est vrai, j’oubliais ! J’ai la mémoire qui flanche, je ne me souviens plus très bien ! Bon, allons quand même la faire auprès de nos enfants, notre non-demande en mariage !

Ecrit pour le jeu de Lakévio n° 128 d'après cette consigne

Posté par Joe Krapov à 09:43 - - Commentaires [16] - Permalien [#]
Tags : , ,


22 octobre 2018

ENCORE UN P'TIT COUP D' CID' ?

Lakévio 126

- Ôte-moi d’un doute. Connais-tu bien don Diègue ?

- Non, Pas du tout.

- Parlons bas ; écoute. Sais-tu que ce vieillard fut la même vertu, la vaillance et l’honneur de son temps ? Le sais-tu ?

- En fait, là, je n'ai pas le temps. Et même tu me déranges.

- Cette ardeur que dans les yeux je porte, sais-tu que c’est son sang ? Le sais-tu ?

- Non, mais je...

- À quatre pas d’ici je te le fais savoir.

- Ecoute, je ne voulais pas...

- Parle sans t’émouvoir. Je suis jeune, il est vrai ; mais aux âmes bien nées la valeur n’attend point le nombre des années.

- Faudrait me laisser parler !

- Mes pareils à deux fois ne se font point connaître, et pour leurs coups d’essai veulent des coups de maître.

- Comment ça ?

Lakévio 126 Gerard Philipe

- Oui ; tout autre que moi au seul bruit de ton nom pourrait trembler d’effroi. Les palmes dont je vois ta tête si couverte semblent porter écrit le destin de ma perte. J’attaque en téméraire un bras toujours vainqueur, mais j’aurai trop de force, ayant assez de cœur.
À qui venge son père il n’est rien d’impossible.

- Mais pas du tout ! C'est toi qui...

- Ton bras est invaincu, mais non pas invincible.

- Tu te fais des films !

- D’une indigne pitié ton audace est suivie : qui m’ose ôter l’honneur craint de m’ôter la vie !

- Bon je te laisse là.

- Marchons sans discourir.

- Oui, c'est ça !

- As-tu peur de mourir ?

- OK ! Rappelle-moi ce soir. Je file, là !


Ecrit pour le jeu n° 126 de Lakévio d'après cette consigne.

Posté par Joe Krapov à 09:18 - - Commentaires [12] - Permalien [#]
Tags : , ,

PAN SUR TA TRUFFE !

Lakévio 126 vitrail

- L'amour qui nous attache aux beautés éternelles
N'étouffe pas en nous l'amour des temporelles ;
Nos sens facilement peuvent être charmés
Des ouvrages parfaits que le Ciel a formés.

- Non, Pas du tout.

- Ses attraits réfléchis brillent dans vos pareilles ;
Mais il étale en vous ses plus rares merveilles ;
Il a sur votre face épanché des beautés
Dont les yeux sont surpris, et les coeurs transportés,
Et je n'ai pu vous voir, parfaite créature,
Sans admirer en vous l'auteur de la nature,
Et d'une ardente amour sentir mon coeur atteint,
Au plus beau des portraits où lui-même il s'est peint.

- En fait, là, je n'ai pas le temps. Et même tu me déranges.

- D'abord j'appréhendai que cette ardeur secrète
Ne fût du noir esprit une surprise adroite ;
Et même à fuir vos yeux mon coeur se résolut,
Vous croyant un obstacle à faire mon salut.

- Non, mais je...

- Mais enfin je connus, ô beauté toute aimable,
Que cette passion peut n'être point coupable,
Que je puis l'ajuster avecque la pudeur,
Et c'est ce qui m'y fait abandonner mon coeur.

- Ecoute, je ne voulais pas...

Lakévio 126 ob_dfd659_tartuffe-1

- Ce m'est, je le confesse, une audace bien grande
Que d'oser de ce coeur vous adresser l'offrande ;

- Faudrait me laisser parler !

- Mais j'attends en mes voeux tout de votre bonté,
Et rien des vains efforts de mon infirmité ;

- Comment ça ?

- En vous est mon espoir, mon bien, ma quiétude,
De vous dépend ma peine ou ma béatitude,
Et je vais être enfin, par votre seul arrêt,
Heureux si vous voulez, malheureux s'il vous plaît.

- Mais pas du tout ! C'est toi qui...

- Ah ! pour être dévot, je n'en suis pas moins homme ;
Et lorsqu'on vient à voir vos célestes appas,
Un coeur se laisse prendre, et ne raisonne pas.

- Tu te fais des films !

- Je sais qu'un tel discours de moi paraît étrange ;
Mais, Madame, après tout, je ne suis pas un ange ;
Et si vous condamnez l'aveu que je vous fais,
Vous devez vous en prendre à vos charmants attraits.

- Bon je te laisse là.

- Dès que j'en vis briller la splendeur plus qu'humaine,
De mon intérieur vous fûtes souveraine ;

- Oui, c'est ça !

- De vos regards divins l'ineffable douceur
Força la résistance où s'obstinait mon coeur ;
Elle surmonta tout, jeûnes, prières, larmes,
Et tourna tous mes voeux du côté de vos charmes.
Mes yeux et mes soupirs vous l'ont dit mille fois,
Et pour mieux m'expliquer j'emploie ici la voix.

- OK ! Rappelle-moi ce soir. Je file, là !

Ecrit pour le jeu n° 126 de Lakévio d'après cette consigne.

Posté par Joe Krapov à 09:17 - - Commentaires [0] - Permalien [#]
Tags : ,

UN APPEL DE LONDRES

Lakévio 126 contour- Écoute ! Maman est près de toi ?

- Non, Pas du tout.

- Il faut lui dire : « Maman c'est quelqu'un pour toi ». Ecoute mon cœur qui pleure !

- En fait, là, je n'ai pas le temps. Et même tu me déranges.

- Dis-lui je t'en prie, dis-lui : « C'est important et il attend ». Raconte-moi : comment est ta maison ? Apprends-tu bien chaque soir toutes tes leçons ?

- Non, mais je...

- Dis-lui que j'ai mal, si mal depuis six ans et c'est ton âge, mon enfant. Les noix sont sèches.

- Ecoute, je ne voulais pas...

- Le téléphone pleure quand elle ne vient pas, quand je lui crie « je t'aime » les mots se meurent dans l'écouteur. Les carottes sont cuites.

- Faudrait me laisser parler !

- Le téléphone pleure. Ne raccroche pas ! Je suis si près de toi avec la voix. Yvette aime les grosses carottes.

- Comment ça ?

- Le téléphone pleure pour la dernière fois car je serai demain au fond d'un train et les sanglots longs de l’automne blessent mon coeur d’une langueur monotone.

Lakévio 126 messages codés de Radio Londres

- Mais pas du tout ! C'est toi qui...

- Dis mais retiens la ! Allons insiste. Si elle est partie alors tant pis. Allô !

- Tu te fais des films !

- Oh dis-lui que j'ai mal, si mal depuis six ans et c'est ton âge, mon enfant. John has a very long moustache.

- Bon je te laisse là.

- Seras-tu aux prochaines vacances à l'hôtel Beau-Rivage ? Aimes-tu la plage ? Le canapé est au milieu du salon.

- Oui, c'est ça !

- Oh ! Dis-lui toute ma peine, combien toutes les deux, moi, je vous aime. Melpomène se parfume à l’héliotrope.

- OK ! Rappelle-moi ce soir. Je file, là !

Ecrit pour le jeu n° 126 de Lakévio d'après cette consigne.

Posté par Joe Krapov à 09:15 - - Commentaires [0] - Permalien [#]
Tags : ,

14 octobre 2018

LE PURITANISME VOUS (P) HÉRISSE-T-IL LE POIL ?

Lakévio 125 121235847

Tableau de Coby Whitmore

- Non mais tu te rends compte, Kiki  ? Tu l'as reconnue ? C'est une de ces horribles bonnes femmes qui font de la réclame pour Dépil Tech ! Ca me fait penser qu'il faut que je t'emmène chez le toiletteur !

- Wharf ! Wharf ! [Traduction : Toutes les excuses sont bonnes pour me chercher des ca-niches !]

Lakévio 125 Dépil Tech 1

Lakévio 125 Dépil Tech 2


Ecrit pour le jeu n° 125 de Lakévio d'après cette consigne

Posté par Joe Krapov à 16:14 - - Commentaires [10] - Permalien [#]
Tags : , ,

07 octobre 2018

MÉMOIRES D'ENFLURE

Ma petite maîtresse m'aimait beaucoup et je le lui rendais bien : je l’avais baptisée Vahiné ; elle me soignait quand je me traînais tout flapi, me caressait longuement, me regonflait pour que je prenne du volume et sois en mesure de l’honorer, le contrat que nous avions signé afin de nous envoyer en l’air ensemble : ça gazait bien entre nous. 

Quand il faisait mauvais et que nous ne pouvions pas sortir, elle venait me voir dans ce que j’appelais mon écurie ; elle m'apportait du pain d’épices pour la route, de l'herbe fraîche car j’adorais me vautrer dans la beuh à l’époque, des récits de ce qu’elle éprouvait au septième ciel que j’écoutais passionnément de mes oreilles largement ouvertes comme des feuilles de salade et me promettait, l’automne arrivant, de m’envoyer planer bien au-dessus des arbres aux couleurs de poil-de-carotte ; elle restait avec moi longtemps, bien longtemps ; elle me parlait, croyant que je ne la comprenais pas, m’appelait son Mongol fier, son Ballon d’or et se blottissait dans la nacelle de mes bras ; elle me contait ses petits chagrins, me disait combien je l’aidais à jeter du lest dans sa vie bien chargée et bien souvent, comblée des joies renouvelées que nos exercices physiques lui procuraient, quelquefois elle pleurait de bonheur.

Extrait de : "Mémoires de Bienmonté, aérostat sarthois" par Jean-Claude Raggamuffin.

 

Lakévio 124 Mémoires de Bienmonté

Ecrit pour le jeu n° 124 de Lakévio d'après cette consigne.

Posté par Joe Krapov à 19:29 - - Commentaires [10] - Permalien [#]
Tags : ,