26 mars 2020

LE HARENG A LA JAPONAISE

Léon le pêcheur 01 réduit

A la maison, en ce temps-là, il n’y avait que le grand-père pour manger du poisson.

C’est peut-être parce qu’il était lui-même un grand pêcheur devant l’éternel. A revoir les albums et les boîtes de photos que j’ai récupérés récemment on pourrait croire qu’il a passé sa vie à accrocher des vers au bout de son hameçon, à monter des lignes avec des petiti plombs, à amorcer, à surveiller son bouchon, à se faire photographier avec de jolies prises.

C’est peut-être cela, le secret du bonheur : être pêcheur au bord de l’eau.

Tout ça pour dire que Maman, qui faisait les courses des deux familles, s’arrêtait parfois « au Saumon d’or », chez Jules Turbiez, le poissonnier de la grand’rue, et qu’elle ramenait des rollmops ou des harengs saurs qu’on appelait des saurets. Je n’ai pas souvenir qu’elle ou grand-mère aient jamais cuisiné du cabillaud, du thon, du lieu ou du sabre comme je le fais très souvent maintenant. 

Poissonnerie Jules Turbiez 
Photo d'un "mariach' à sabots" extraite du calendrier 2017 de la ville de L.

Alors vous pensez bien, le hareng à la japonaise, ça a été un grand moment de drôlerie dans notre histoire commune !

C’était en 1980, à Cracovie, je crois. Il nous avait emmenés, ma grand-mère, mon frère et moi, passer des vacances en Pologne et en Tchécoslovaquie où il avait des connaissances et des points de chute pour le logement.

Vous-ai-je déjà dit qu'il était un espion du KGB ? Oui, je l'ai dit et ceci explique cela.

Ce jour-là, on était entrés, tous les quatre, sans accompagnateur autochtone, dans un restaurant.

On a regardé la liste des plats sur le menu mais tout était écrit en polonais et uniquement en polonais. Pour demander des explications en allemand ou en russe, les deux langues dans lesquelles, avant même d’être devenu Breton, je pouvais baragouiner quelque peu, c’était compliqué : les Polonais, pour des raisons d’envahissements intempestifs de leur territoire que l’on sait, détestent entendre le sabir de leurs voisins de droite comme de gauche. Tout ce qu’on savait c’est que les knedliky, ces boulettes de farine qu’on vous servait trempées dans une espèce de soupe, c’était pas top.

Alors on s’est lancés au hasard et moi, comme entrée, j’ai pris « Śledź po japońsku ». C’était d’autant plus gonflé qu’à l’époque on avait encore moins idée de ce que pouvait être la cuisine japonaise mais on ne se faisait pas de sushi pour si peu. On verrait bien !

Eh bien figurez-vous que c’est très bon, « Śledź po japońsku » ! C’est du hareng fumé mélangé avec des pommes, des cornichons et de la crème fraîche !J’ai fait goûter le plat à mon grand-père. Tout le restant de sa vie il a regretté de ne pas avoir fait le même choix que moi !

Finalement, la cuisine, c’est comme le jeu d’échecs ! Ce n’est pas vous qui gagnez, c’est l’autre qui fait le premier une erreur dans son choix !

En voici la recette qui est devenu un plat traditionnel de la maison Krapov :

Vous prenez un paquet de filets de harengs fumés doux. Vous les passez sous le robinet histoire de les dessaler un peu, même si, en argot, le hareng est toujours dessalé.
Vous coupez les filets en morceaux d’un centimètres.
Vous les mettez dans un grand saladier.
Vous épluchez un oignon et le coupez en fines lamelles.
Vous ajoutez trois ou quatre petits cornichons coupés en tronçons.
Puis deux cuillères à café de câpres.
Un piment de Cayenne séché que vous découpez très (con)finement.
Puis trois pommes fruit que vous pelez, épépinez et coupez en demi-quartiers.
Vous versez là-dessus deux cuillères à café de jus de citron, une cuillère d’huile d'olive, du poivre et un pot de dix centilitres de crème fraîche.
Vous mélangez et servez frais.

Bon appétit !

Pardon : Smacznego !



Pondu pour l'atelier d'écriture de Villejean le mercredi 25 mars 2020
d'après la consigne ci-dessous


CONSIGNE D'ÉCRITURE 1819-23 DU 24 MARS 2020 A L'ATELIER DE VILLEJEAN

Recette

 

Que faire quand on est confiné chez soi, avec interdiction de sortir faire du sport, pour continuer à rester en forme ? Deux solutions : soit jeûner, soit bien manger !

Vous avez certainement par-devers vous une recette (de cuisine, de santé, de zénitude, etc.). Partagez-la avec nous et surtout dites-nous de qui vous la tenez et quels sont les souvenirs qui lui sont attachés.

Vous pourrez aussi si vous le voulez insérer cinq expressions de cette liste dans votre texte : 

AEV 1920-23 consigne61uTKTHHfDL

à la noix de coco
aux petits oignons
beurré comme un petit Lu
boire du petit lait
chacun son pain et son hérin (hareng)
confit en dévotion
courir sur le haricot
donner de la confiture à des cochons
en avoir gros sur la patate
engueuler comme du poisson pourri
être bon comme la romaine
finir en queue de poisson
grand dépendeur d’andouille
il ne faut pas s’endormir sur le rôti
l’avoir dans le baba
la fin des haricots
les carottes sont cuites
manger de la vache enragée
mi-figue mi-raisin
pédaler dans la choucroute
sucrer les fraises
tailler une bavette
tomber dans les pommes

Posté par Joe Krapov à 03:57 - - Commentaires [0] - Permalien [#]
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