Lorsque Logre est en colère
Toute la maison tremble.

Les assiettes brinqueballent,
Les verres à pied parkinsonnent,

La cafetière sur le feu
Se claquemure sous son couvercle,

L’oiseau jaune du coucou
Ne sort plus pour donner l’heure,

Le rocking-chair se renverse
Et son plaid plaide coupable,

Le portrait de la grand-mère
Se décroche la mâchoire,

Le troupeau des sept fillettes
Monte se réfugier dans sa chambre,

La soupe qui était déjà fade
Il faudra se la fader froide.

Le chambranle de l’entrée
Se prend la porte en plein nez

Ca y est ! Papa est sorti
Pour faire un tour dans la nuit,

Commettre un horrible meurtre,
Faire pousser les hauts cris

Au vent qui hurle Déraison
Par-dessus les toits des maisons.

AEV 1617-07 Ogre islandais

Madame Logre se redresse
Et remet tout en état

Elle verse du lait au chat
Puis elle monte jusqu’au grenier.

Son pied fait grincer les marches
De ce très vieil escalier.

Elle donne un tour de clé
Puis allume la bougie.

Très tranquille sous son suaire
Le vieux fantôme est ravi :

On vient lui rendre visite.
Elle est bien cette petite !

Mais ce soir c’est très bizarre
Ce soir, il y a un lézard.

- Oncle Arthur, dit la pauvrette,
S’il te plaît, viens-nous en aide !

Il faut me débarrasser
De ce monstre de mari !".

- Je sais, répond le fantôme,
Les raisons de sa colère.

Je crois qu’il n’ira pas loin :
J’ai planqué ses mocassins

Et pour moi, sept lieues, c’est rien !".
Dit l’être sans consistance.

Il ouvre l’œil, le bon, l’œil-de bœuf, et s’élance
Dans la nuit et le silence.

Il repère l’individu
Qui vitupère ses "Rogntudju".

Son sale caractère-cratère
Eructe d’affreux borborygmes,

Des injures qui s’élèvent,
Des miasmes pestilentiels.

Et le fantôme, du ciel,
Fait tomber la pluie propice.

Lors, dans le profond précipice
De l’ire de l’ogre qu’on vexe,

Dans tous les creux et plis et replis de ce cave,
Tout retombe en coulée de lave,

Etouffe ses velléités
De craquer, cracher, craqueler à jamais.

Ca y est le volcan est éteint !

AEV 1617-07 Volcan islandais

***

Et puis c’est la musique du petit matin calme.

La femme et les sept filles de Logre
Sortent danser dans le jardin.

Tout respire en paix sur la lande.
C’était le dernier ogre-volcan de l’Islande

Dont, par pitié pour vos oreilles,
Nous cacherons le patronyme.

Seul le chat noir, Spépatafjöll,
Regrette la pétrification du grand maître de la maison

Il lui donnait parfois en guise de cadeau
Des petits bouts de bébés d’hommes.

Mais il se fait une raison. Car les chats savent mieux que nous
Qu’"Avec le temps, va, tout volcan !".

Pondu à l'Atelier d'écriture de Villejean le mardi 8 novembre 2016 
à partir de la consigne 1617-07 "Imagidés" décrite ci-dessous.

Photos empruntées au web.